vendredi 17 décembre 2021

Je ne vivrai jamais sous vos sabots lourds et bruyants, 4

 




 

Je m’appelle Saloua et je suis six pieds sous terre. 

Je suis toutes les Saloua libres de la terre. Les Saloua, besogneuses, debout, promptes et rompues à la réflexion. Je suis toutes les Saloua qui disent et revendiquent. Non, je ne vivrai jamais sous vos sabots lourds et bruyants.

 

Janvier 2008

J’évolue dans un environnement toxique, bête et vulgaire. Qu’ai-je à voir avec cette engeance, race des Idiots suprêmes et des opportunistes ?

Les vicissitudes de la vie. La pudeur nous accule au silence, histoire de dignité. Je ne perdis jamais la mienne même au fort de la dictature et de son obscénité.

On me fit savoir qu’il fallait que je réprimande mon amie : elle était trop libre pour eux, trop droite et rigoureuse. Nous étions à des années lumières égarées parmi les oies et les lèche-bottes. Un environnement des plus kafkaéens ou, bien plus à la lettre, des moins kafkaéens. 

Pourquoi ? Comment ? Dans quel objectif ?

Je suis un être beau, élégant, un être en souffrance et qui sourit. J’évolue sur mon lieu de travail comme une âme en peine, aux abois.


-        Quelle élégance, Saloua !

-        Ils t’en veulent !

-        Je quitte aujourd’hui même, s’il le faut.

-        Ils me veulent crapuleuse. A leur image.

-        Ne t’inquiète pas.


L’instruction en haut lieu était d’être crapuleuse. Affaires de crapules. D’Ignorants suprêmes. De clans. D’encens et de prières. De danses lascives et de clowneries, de prostitution tous azimuts. C’est cela la dictature et son parterre.

J’ai un poste de responsabilité, je suis très élégante et ma réputation n’est pas à faire. Sur ce lieu de travail, n’importe qui pouvait avoir son mot à dire, tout dépendait des accointances. De la proximité. Je voyais la propriétaire des lieux aller et venir, une troupe autour, ça brassait du vent mais globalement et en devanture, c’était assez correct. Le pire est dans le fief et les subalternes. Du vent et de l’apparat, de la violence aussi. 

Je faisais bonne figure et je n’avais qu’un désir : déguerpir. Mon amie me disait : « Le travail et la rigueur, il n’y a que cela qui compte. Voilà pourquoi. »

J’évolue dans un environnement toxique. La froideur fait rage. Je souffre de l’absence d’un être de chair, égaré, et, je souris. Je fais bonne figure. Je souffre de froid, ici et là.

 

Il fait un froid polaire ici mais le pire est celui des nôtres, le froid de l’existence, le froid des relations quant au beau milieu du parcours, on se croit immortel ou inatteignable ou invincible. 

Tous sont tombés comme des mouches, toutes mouches de coche qu’ils aient été, bêtes, vulgaires, flagorneurs et intéressés. Au milieu de ces obscénités, aujourd’hui encore impunies, malgré la peur du bras armé, j’ai gardé ma dignité. Je suis partie meurtrie mais digne et discrète, spoliée mais la tête haute et les mains limpides. Je n’ai pas collaboré, j’ai travaillé.

Un épisode de vie que celui-ci, que je n’ai pas cherché, qui est venu à moi, parce que j’ai un savoir-faire et que je suis intègre.


A toutes les Saloua, nombreuses dans cette contrée, levez la tête, avancez, écoutez et réagissez ! La femme est libre ou elle n’EST pas. La femme a le verbe signifiant haut ou elle n’est que complément. La femme est directe ou elle n’est que pièce décorative dans un cadre de bienséance et d'apparat. 

La femme est verbe sémique, construction signifiante, bras innovant et édifiant ou elle n’est que vie plate de subalterne.

 

Je suis la Marianne de toutes les Saloua subversives et constructrices, afin de greffer la liberté sur les gènes porteurs et dépourvus de scléroses. Je suis nourrie de la Marianne d'antan, mais je suis Saloua.



 


 

 

 


 

 

 

 

 

 

 

 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire