- Personne ne veut d’une relation d’intellect, de livres, de Spinoza et de promenades en mer ... Désolée.
- Peut-être, aujourd’hui, que tu as raison, en effet.
- Pourquoi aujourd’hui ? C’est de toujours.
- Oui, tu as sûrement raison.
- Pourquoi tu es laconique ? Où est ton exubérance ?
- Il y a des jours sans.
( Sourire de circonstance )
- Maman, secoue-toi !
- Évidemment que je ne laisse rien prendre le dessus sur moi, même pas moi-même !
- Maman, pourquoi tu n’es pas une mère ordinaire ?
- Je le suis Div. C’est toi.
- Je veux dire une mère dans sa cuisine, son linge …
- Mais je suis dans ma cuisine, mon linge …
- Maman, tu vis dans un monde parallèle.
- Et ?
- Et c’est fatigant !
- Donc, je vis dans un monde parallèle alors que, tous les matins, je fais ma toilette, nettoie l’espace de ma chienne, lui donne son petit-déj, la câline, échange quelques mots avec elle, m’habille, prépare mon café avec elle, en face, devant la cuisine, range mon espace, lance une machine, quand c’est nécessaire, et me mets aussitôt au travail. Ce monde, selon toi parallèle, dans lequel je vis, te fatigue toi. Je ne comprends pas Div.
- Maman, ton monde, dès l’instant où tu es à ton bureau !
- Oui et donc ?
- Il est fatigant ! Voilà !
- Div, c’est mon monde, mon espace, ma catharsis, ma purgation des Passions, mon espace d’élagage, mon grâal …
- Je veux dire, sors plus, éclate-toi !
- Mais je sors, je dîne, je ris, je me fais belle, je vois une poignée au volet …
- Bon. Il te faut quelqu’un.
- Mais j’ai mon monde, tu l’as dit ! J’ai mes cadres de transposition, mes décors, mes femmes et mes hommes, mes dadas, mes répulsions, mes passions. J’ai S., mon personnage-phare, un génie fou, qui détecte tout au centième près, un anti-social pur qui se raconte au cabinet de Didon tous les jeudis. Un philosophe existentialiste, mais pas tout à fait dans le sens sartrien, complètement à l’ouest, mais qui sait dire, attirer le regard, anticiper, lire dans les pensées …
- Il te ressemble étrangement ( en aparté, à mi-voix ) Bon, maman, tu viens passer quelque temps chez moi. Le Lac Majeur t’attend. Tu verras, c’est sublime. Pas une miette par terre.
- Alors, oui, je viendrai.