Il arrive quelquefois que l’on soit excédé par un cumul de dysfonctionnements, d’incohérence, de laisser-aller, d’inconscience, de retard mental, de pollution, d’irrespect, de politique de bas niveau, de mensonges éhontés, d'oubli, d'absence de reconnaissance …
C’est le jour.
Outre le fait que quand une personne de qualité assez rare pour le pays meure, personne ne s’en soucie.
Féministe, activiste sereine, droit-de-l’hommiste, femme de lettres, Professeur, chercheuse, Saloua Ayachi n’est plus.
Féministe, activiste sereine, droit-de-l’hommiste, femme de lettres, Professeur, chercheuse, Saloua Ayachi n’est plus.
Partie dans sa discrétion habituelle non sans avoir lutté pendant près de cinq ans contre le mal. Une Dame d’une grâce féminine rare, ces derniers temps.
Je dispose de quelques textes co-écrits avec SA. Nous avions des vues communes et le même esprit de combat viscéral vis-à-vis du machisme et des poncifs d’où qu’ils viennent.
Dans un pays où l’exercice de la pensée profonde est assez rare, dans un pays où les écrits, de surcroît féminins, de réflexion poussée ne sont pas légion, inscrire la plume de SA dans le Panthéon de la pensée féminine tunisienne est un devoir qui, personnellement, m’incombe.
Oui, SA est une intellectuelle tunisienne de qualité, une plume incisive, une pensée à ramifications et à étages. Le pays peut en être fier même si l’époque est plus aux certitudes dogmatiques destinées à ratisser large, au spectacle désolant, dans les instances du pays, de la femme asservie et instrumentalisée. La ouliya disait mon géniteur en colère, terrible périphrase pour signifier "pauvre femme sans soutien en besoin du Sauveur". Merci à toi, mon géniteur, de l'esprit combatif, du refus de l'inertie et du diktat traditionaliste. Le sien aussi, fort probablement, ancien directeur du Théâtre municipal de la ville de Sousse, fleuron de l'esprit anti-colonial, avec d'autres régions.
Un travail de mémoire est absolument indispensable pour participer à l’édifice national de la pensée tunisienne féminine même si j’abhorre ce distinguo. Souhaitant que ses fils, deux praticiens dont elle était si fière, puissent un jour réunir les écrits de leur mère et les mettre à la disposition de celles et de ceux qui voudraient mesurer l’apport de la femme tunisienne dans la construction d’une société d’égalité, de parité absolues, de modernisme et de liberté de penser et d’être.
SA, ces dernières années, dans son combat personnel contre le mal, avait conservé toute sa clairvoyance intellectuelle, tout son courage, sa sérénité. Elle s’adaptait à l’inconfort, à la rémission, à la rechute, au protocole médical avec un calme admirable et une patience rare.
Nos échanges allaient jusqu’aux confins du corps, dans sa toute puissante fragilité. Enorme. Un esprit qui restait vif dans un physique qui partait.
Repose Saloua, tu es une Fierté pour les tiens, pour ce pays aux quatre coins aujourd’hui, que nous ne lâcherons pas. Fleur d’été, Fleur d’un pays qui renaîtra de ses pires cendres, Fleur de la pensée immortelle.
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