vendredi 31 janvier 2020

Dante Di Kastel III, Mourir, une promesse !




 « Dante, ce que je déteste par-dessus tout, ce sont les jours creux. Les jours où les mots perdent leur sens. Les jours où je ne crois plus en leur pouvoir, bien vrai pourtant. 

Les mots allègent, les mots partent et se renouvellent, font du chemin et pénètrent d’autres entités. Ils sont immortels tant que les décrypteurs s’arrêtent à leur passage. Les mots disent, signifient, font jongler les neurones. Ils produisent du sens, impulsent la réflexion, aboutissent. Ils rendent heureux et sauvent, souvent, de la déroute. Les mots sont riches, tellement. 


Les jours pâles de l’absence des mots sont jours laids et inféconds. Jusqu’au retour du pompiste, des convictions profondes, de la ténacité des mots.
Sans les mots, il n’y a pas d’humanité.

Hier, en bord de mer, une belle Dame me dit savamment d’écouter des mots. Une pédagogue. Elle les citait et, au moment qui lui semblait important de hautes significations, elle me rappelait d’écouter.

-      Écoute bien maintenant, c’est très important. Note la restriction. C’est capital.

Elle citait un texte phare dans une langue dont je n’ai pas la maîtrise totale. Elle en est spécialiste, elle.

Ber est une croyante libre. Elle croit en sa religion mais s’autorise des écarts, pour peu que le rationnel le permette. 

-      - Tout texte est un produit humain Ber. Tu imagines bien que si le Créateur voulait écrire, il l’aurait fait de mille et une manières. Les écrits sont nécessairement humains. Des tablettes en argile, aux peaux, aux papyrus jusqu’au livre électronique. 

Elle me regarda. Je connais ce regard. C’est celui des croyants qui réfléchissent, même devant l’absurde. 

-      - Je ne suis pas pratiquante, croyante, bien entendu, mais je crois beaucoup en la sincérité aussi.

Nous partageons des valeurs communes et Ber comprit, très probablement, que mon système de convictions personnelles est assez solide pour que je puisse m’y appuyer.
Parce qu’une religion est exactement la même chose, avec la liberté en moins, la peur en moins. Peut-être, la peur en moins. 


Dante, vivre avec une conviction de son propre génie est juste une énorme chose : une avancée prodigieuse, une réflexion profonde, un délestage culturel puissant, des paramètres personnels de comparaison, de mesure, de logique, de conviction certaine. C’est énorme, libérateur et agile.


Récemment, un homme souffrant du cœur, a eu un arrêt cardiaque de quelques instants. Il fit part de son expérience aux médias spécialisés, se définissant, solennellement, comme un pur cartésien loin de toute religion et de tout ésotérisme.

-     - Il y a une vie, oui il y a une vie. J’ai quitté mon corps. Non, je n’avais pas de consistance plutôt. Et je sentais la vie. Je sentais une vie. Je n’étais pas éteint. Une vie aux mille portes, légère. Et, je SAVAIS.

Dante, j’ai vu mourir, de très près, trois personnes. C’était violent. Peut-être moins pour SBelk. Pour elle, c’était en longueur. Elle avait mis trois jours à définitivement partir. Mais, je crois, qu’elle ne sentait pas son agonie. Je crois. Il y a une grosse glissade et après, le mécanisme tire les volets un à un. 

Ce n’était pas pareil pour le Pourvoyeur ni pour l’Italien. C’était extrêmement rapide, foudroyant. Je me souviens, j’avais 20 ans, je roulais à une vitesse folle. Et quand je regardai le profil du Pourvoyeur, je lui vis une peau sèche, d’un coup, et tirée et, une drôle de couleur : il avait verdi. 

L’Italien, lui, pensa un instant qu’il avait, encore, les choses en main.
-        -  Attends, dit-il. 
Il se rallongea, poussa trois râles, et, mourut.

Cela avait été, a été, terrible. Il y a un tel choc, au premier sens du mot. Les yeux restent longtemps écarquillés et, on fait semblant.  
J’avais un œil dans le cerveau, consciente et même inconsciente. Un œil. Pendant des années. Encore aujourd’hui, mais il y a le mérite, immense, de l’auto-mensonge et du témoignage.

-      - Youpi, il y a une vie après la mort ! Mourir est un moment de changement et de science nouvelle. Ce sera sympa de s’y trouver. Du nouveau, vous dis-je ! Enfin quelque chose m’arrive : je vais commencer un parcours de l’autre côté ! »







jeudi 30 janvier 2020

Dante Di Kastel II



« Dante, il y a des choses qui lacèrent et de voir écrit que Salvator était malade m’avait figée sur place. Non, cela ne pouvait être vrai parce que ce Monsieur est un être de lumière, de simplicité et d’humanisme. Salvator est limpide et ce serait douloureux de le voir amoindri. Et il ne le sera pas, par la grâce d’une Justice du monde. Je veux y croire, moi qui ne sais que deux vérités : vivre et partir. Entre les deux, il y a un tronçon à construire, le sien.

Je crois Dante que l’existence se résume en deux choses : la vérité et la sagesse. La vérité a besoin de lucidité, de beaucoup de lucidité pour espérer très peu de vérité. Mais c’est déjà cela. 
La sagesse est précisément de faire du peu de vérité auquel nous accédons des critères de vie.
Et puis, il y a le moteur du monde, le désir. Ce qui fait de nous des êtres arc-boutés vers les différents faire vitaux.

Aujourd’hui, je me suis levée positive. J’ai réuni dans mon esprit tous les éléments qui me laissaient voir Salvator comme un être nécessairement protégé. Je savais que rationnellement, cela n’avait aucun sens. Mais mon désir était tel que mon esprit écarta impitoyablement et sans rationalisme aucun, les incidences possibles et gratuites qui vous mettent fréquemment devant des situations insupportablement avérées. Ma tête a surchauffé et mon désir fut maître. Oui, se mentir est nécessaire pour faire passer le temps, avec moins de dégâts.

Il m’arrive très souvent de me poser des questions sur le bonheur. Et ma définition d’aujourd’hui est simple : il n’y a aucune incidence gratuite et inexplicable. C’est énorme. 

Je t’expliquerai beaucoup de choses Dante, parce que j’aime penser les petits riens et, parce que mon objectif est de mettre de côté le max de petites vérités. »

jeudi 23 janvier 2020

Dante Di Castel





«  Dante, ma résolution est d’éviter complètement les hypocrites, les faux-jetons, les Idiots suprêmes, les adeptes du conventionnel, les oisifs de la pensée, les médisants, les adeptes de la comédie sociale, les menteurs invétérés, les jaloux morbides, les creux de la matière grise, les amateurs de piques, les méchants, les gros bêtas et tous les nuls du cœur et de la pensée.

Beaucoup de monde, j’en conviens mais une belle solitude. Et des livres et de la plume et quelques percées de qualité avec des êtres d’exception. 

Co a été un mirage. Et puis, cette île a besoin d’essence ontologique.

Le passé, pas très lointain, était fait de sens, peut-être de pseudo-sens, de l’autre côté du rivage mais de sens quand même. Jusqu’aux déformations inéluctables. Peut-être que la boulimie de l’estomac neuronal était trop puissante, peut-être que les brèches ne pouvaient être comblées.

L’autre rivage était frêle de l’intérieur. Malgré la peau dure. Un porteur de carapace mais je sortais du cocon et Sbelk, sans mère, ne connaissait pas, non plus, les rouages des êtres de costumes. Elle écoutait son crooner à la voix mélodieuse, lui-même en costume de scène, avec ses inclinations.

Tu vois Dante, les mensonges sont très vieux. Ils participent aux connexions labyrinthiques, aux digressions qui enflent le monde. Peut-être sont-ils nécessaires. Ils le sont, pour les professionnels. Mais je n’aime pas toujours les maîtres.

L’autre était en reste. De beaucoup de bases. Je ne pouvais le savoir. L’imaginaire est une inflation, belle, mais douloureuse à la chute.

Je t’expliquerai beaucoup de choses Dante. »

Carnets de psy, IV





« Elle me regarda et me dit : « Tes jambes sont trop blanches, elles sont moches. Ne mets plus de court. »

J’ai exactement les mêmes jambes qu’elle. 

Je n’ai jamais oublié que le jour de mon mariage, elle porta, elle, les bijoux que je reçus en cadeau de la part de mon mari. Je veux partir d’ici, loin, je ne veux pas avoir à m’occuper d’elle, le jour où elle tombera. Je ne pourrai pas.

Je ne sais pas dire non, je ne sais pas faire mal et je n’ai jamais eu confiance en moi. Jamais.

J’adore la psychanalyse et je lis beaucoup tout ce qui est en rapport. Je crois que je me lis en permanence et mon époux qui s’y connait m’aide beaucoup.

J’ai compris tout récemment que mon père ne gérait pas, ne gérait rien du tout. C’était elle. C’est elle.

Mais pourquoi ai-je été si mal aimée ? Pourquoi ? 
C’est vrai, l’aîné ou on le sur-réussit et il peut être castrateur pour ceux qui suivront. Ou on expérimente le faire éducatif sur lui et on brise quelques os de son âme.

( Elle pleurait doucement. Le nez bouché. Ses mains douces et expertes continuaient à travailler. Elle donnait de la souplesse, de l’hygiène, du bien-être et pleurait en douce. Elle avait 50 ans, en faisait 38. Elle pleurait à 50 ans une enfance malmenée. Elle comprenait mais ne comprenait pas en réalité. Une douleur saisissante. )

« Non, je ne peux pas lui dire tout ce que je pense d’elle. J’ai essayé mais ils le prennent mal. Peut-être le faut-il mais je ne pense pas avoir le cran nécessaire. Oui, vous avez sûrement raison, je prends trop sur moi, je ne peux exprimer mon mécontentement, ma peine, ma douleur. 

J’ai perdu mon père de substitution, je l’aimais tellement. Lui-même a été écrasant avec son fils mais il se rattrapait en m’aimant moi. C’était mon vrai parent. Je le pleure toujours.

Je crois que j’ai encore d’énormes carences affectives. Peut-être sont-ils devenus parents après moi ? Mais je suis celle qui ne déchire pas le voile sur ces innombrables petites peines que j’ai en moi. Pourquoi déjà ?

Je ne sais pas si je peux lui envoyer tout cela. Peut-être que je devrais. Mais les mots ne sortent pas. Et même que j’acquiesce quand je meurs d’envie de hurler.

Je veux partir très loin d’ici, je veux fuir avant l’heure de vérité, pour elle. Non, je ne pourrai pas donner ce que je n’ai pas reçu. Je veux avoir l’alibi pour mon absence de ce moment-là. » 

dimanche 19 janvier 2020

... Un autre qui s'envole






Un jour de janvier avec la promesse d’un printemps imminent et un présent froid et persistant. L’à-venir est une volonté aussi. Une volonté surtout. Elle y est par foi en la résilience mais l’horloge est glacée. 

Un pendant qui vient, un autre qui s’envole et l’implacable réel du moment : pénurie de mots, d’odeurs chaudes et de rires de tisserands.

On ne peut posséder que son univers. Sans atermoiements.
Mais être un Scribe n’est déjà pas si mal.

Se vêtir de mots, s'orner de figures, dire le pudique est un champ fleuri d'émois libérateurs.

Il n'y a que la Résilience qui vaille.

mercredi 15 janvier 2020

A l'Encre du désir, IX





Salvator ne connait pas Satia, pas très bien du moins. Il la voit de l’extérieur et ne focalise pas sur son être profond. De toute façon, il n’y a ni le temps, ni le lieu. Or, Satia est fondamentalement un être profond et une existentialiste pure dans l’acception sartrienne du mot, mais pas que.

Comment peut-on jongler avec les airs du désir sans liberté totale ? 

Comment peut-on aspirer à la félicité, avec une faune qui, sans réflexion aucune, sans compréhension minimale, juge et convient trivialement, qu’un tel est « proche de ses sous » parce qu’il pense sa vie et vit sa pensée ?

Comment peut-on avancer à deux, quand l’autre claudique ?

Pour Satia, il n’y a de vrai que l’autre, le geste vers l’autre, avec une exigence unique : saisir, sentir et construire.

L’humain n’a de valeur que dans la sensibilité, la réflexion en solo, dénuée des préjugés de la petite bourgeoisie apathique, réservoir d’un condensé de bêtise immuable.

-       Non Salvator, le train n’est déjà plus là. Admire l’étendue marine, peut-être que le Beau sera puissant quand nos faisceaux regarderont la même voie salée, fonds de vie, d’énergie, de renouvellement et d’imaginaire. Je hais le commun.



dimanche 12 janvier 2020

A l'Encre du désir, VIII



Ile de Co, octobre 2018

Un lieu de silence complet s’offrait aux yeux de Satia. Elle adorait Co, depuis très longtemps déjà. Les îles sont très spéciales. On a l’impression qu’elles sont coupées du reste du monde. Il y a une ambiance toute particulièrement. Tout le monde se salue, mots ou hochements de tête. Le jour du marché est un jour d’animation extrême. Tout venait de la métropole et la moindre laitue était accueillie comme une reine. 

Satia regardait la mer par la fenêtre et imaginait la place du marché. Elle n’y avait pas été cette fois-là, mais bien des années plus tôt. C’est qu’elle vécut dix étés à Co et en connaissait les spécificités. Là, elle y était pour quatre jours, du travail et de la peinture. 

Peindre l’insaisissable ne pouvait se faire qu’à Co. Elle avait beaucoup hésité avant de s’y rendre. Même que l’idée lui avait paru obscène au départ. Véritablement obscène. Et puis après, les choses firent leur effet. Trois jours avant d’embarquer vers Co, Satia fut saisie d’un état d’agitation incompréhensible. L’appel de l’inspiration, du renouveau, de la créativité. Co agissait fortement sur elle et, elle savait que d’y retourner amorçait un nouveau départ. Ce ne fut pas un. 

Mais, elle peignit durant trois jours des paysages nouveaux, d’une clarté et d’une beauté juvéniles. Mer, eau, ciel, frôlements, douceur et silences sereins. Rien ne vaut la créativité artistique et cette rare connivence avec le silence d’un monde qui ne souffre aucune brutalité.

Elle était, à un moment, totalement paisible face à une mer sans bruit, grise, ensommeillée, avenante et, ce fut, un temps d’abandon rare, de paix intérieure inestimable dans l’oubli complet de toute réalité. 

Être avec soi-même et se laisser aller à la passion du Beau.





Carnets de psy, III



« Elle hurlait que son père s’était marié onze fois et qu’elle allait faire la même chose : « après tout, ce sont des unions tout ce qu’il y a de plus légales devant Dieu et les hommes. »

Mon petit frère a vu les deux premiers et là, c’est le troisième. La trentaine. 

« Ils font du bruit tout le temps mais moi je ne veux pas aller voir. Je déteste. Et je ne dors plus avec mama. Je n’aime pas ça, mama demande à cet homme de me frapper quelquefois. Mais pourquoi ?? »

Il n’en peut plus, il n’a que six ans. Je ne peux pas le laisser vivre ainsi. 

Nous mourrons tous bientôt, je crois, parce qu’elle veut tout le temps un nouvel ami dans son lit.

C’est trop pour moi et j‘ai la tête qui explose. »



samedi 11 janvier 2020

A l'Encre du désir, VII



  
Satiana est dans une logique de rupture ou plutôt de distance, avec tout ce qui n’était pas véritablement clair, sincère. Elle avait décidé depuis un bon moment de n’être que dans le vrai. Pourtant elle savait l’utilité du socialement correct, mais il y a un moment où on fixe ses priorités. Son fol ami de toujours l’appela et lui proposa une balade au port de Baze et elle lui rappela la fois où ils moururent de l’odeur du poisson grillé jusqu’au moment où elle prit la résolution de lui en offrir un. Parce que son problème majeur à lui est l’expression tous azimuts, surtout trébuchante. Drôle celui-là et attachant sauf quand il perd tout sens de l’autre. Mais on ne peut en vouloir à ceux qui ne peuvent opérer des recoupements. Un ami aspie et tout assumer. 

Avec Salvator, filiforme, leste et homme au cœur ouvert, c’était dur. Parce que l’esprit manquait, mais aussi les liens possibles. Il y avait aussi toute cette faune qui ne l’intéressait d’aucune façon. 

-       Je veux du vrai Salvatore, du sens au non-sens et c’est impossible. Alors, trouvons un chemin de croix humain, sans lourdeur mythologique, afin de secourir les âmes en perdition. Dans mon trajet comptent beaucoup la détresse et le mal-être des autres. Voudriez-vous vous y prêter ?

Elle lui proposait de se mettre à l'écoute de la souffrance de ceux qui ne savent pas ramer. Quand lui voulait s'adonner au crawl libre.

Billets d'humeur, janvier 20






I.
Je prends mon déca et je me remémore de son architecture. Onduleuse et belle. Couleur dorure. C’était beau. Vraiment. Et pourquoi pas après tout ? La vie est une série de regards. Oui c’est possible. Une définition parfaitement valable comme d’autres. Quelques instants puissants. Une poignée de gestes d’amour forts. Quelques réalisations marquantes. Sinon de l’Art à durée déterminée. 
Salvator Dali, se promenant avec sa muse, s’arrêta net devant de la bouse de vache. Waw, dut-il dire, ça m’interpelle ! C’est un rare canevas !


II.
Je me suis réveillée ce matin avec la vue obscurcie. C’est que c’est fantasque le désir. D’être, comme on le veut. Pour moi, c’est d’être un Scribe. C’est-à-dire de dire les choses, les êtres, jusqu’au bruissement. Fondamental. Existentiel. Avec tendre la main et F.A.I.R.E.
Je note que la détermination ouvre un peu l’œil. Je continuai.



III.
Ici, hier, c’était la nuit aux longs couteaux. Oui, la pensée totalitaire existe encore et les Hommes n’ont pas fini de résister. Dire non à l’embrigadement est une garantie de survie. A chacun son Hitler. Point Godwin sans aucun doute. Assumé.

jeudi 9 janvier 2020

Carnets de psy, II



« Je me sens seule au monde, j’ai besoin d’une vraie mère. Je crois que je ne sais pas ce que c’est. J’ai passé mon enfance de maison en maison au gré de ses idées à elle, qui lui semblaient plaire aux autres, ceux en qui elle croit. Elle fit sauter la serrure de notre appartement, s’y introduisit violemment. J’avais le cœur qui battait à tout rompre, une peur montait de mes tréfonds, j’en tremble encore. Elle aurait pu nous tuer. Elle cassait tout sur son passage.
J’ai besoin de hauts murs, de molosses autour de moi. Même quand je dors, je rêve qu’elle prépare ma mort. Et j’ai de l’incontinence. C’est comme la veille d’un examen, sauf que c’est tout le temps. Et puis, j’ai honte. »

mercredi 8 janvier 2020

Carnets de psy



Cabinet de coaching psychologique, Paris.
7 janvier.

« Déjà, à cette époque-là, elle constituait un problème dans ma vie. Elle disait que je n’étais pas faite pour les études, qu’il valait mieux que je fasse autre chose. « On verra. Je la connais, c’est moi qui l’ai faite. »

Je ne sais si j’ai eu de sa part des gestes d’affection, je ne pense pas. Je voudrais bien m’en souvenir mais rien. Elle ne s’attarde jamais sur rien. Ne prend pas la peine de prendre connaissance du contenu d’un papier tendu, d’un document. Elle était toujours sur le point de partir, mais vers quoi ?

Je me rappelle de ce scandale au vestiaire de sport du bahut. Elle poussa le gardien de l’entrée et fonça droit vers les vestiaires, me frappa au visage et prit sa paire de bottes :Tu rentreras pieds nus racaille !

Un jour marqué au fer rouge. J’avais pris des pilules après et, in extremis, je fus admise à la clinique. Je ne connaissais pas les borderline jusqu’à vous, les pervers narcissiques. Nous étions tous soumis à ses frasques.

J’ai une douleur indescriptible. »

A l'Encre du désir, VI






Je suis beaucoup seul avec moi-même ces derniers temps et j’ai une partie à gagner. Il m’importe de l’emporter. J’ai toujours voulu être un gagnant et j’ai souvent vaincu. Mais pas assez. Satia est tenace et, moi, je crois à l’instant présent.

 -- Quel est l’intérêt de l’instant présent ? me dit-elle.

Je ne sais quoi répondre, je sais que la vie est une série d’instants présents, d’instants uniques. Elle l’entend autrement. Elle parle d’instants volés, de vols laids, d’équilibre relationnel.
Elle intellectualise tout et c’est ardu de lui faire entendre raison. Elle dit tout penser, tout peser, depuis toujours. Et je commence à la croire.

- Il le faut Salvator, me dit-elle.

samedi 4 janvier 2020

A l'Encre du désir, V, Réflexions de Scribe






Je lis Salvator et Satiana et j’essaye de cerner. Deux êtres humains, bien entendu. Mais pas seulement. Salvator veut retrouver la fougue de ses 17 ans, quand, dans le même temps, Satia souffre. Il est conformiste, elle est dans la « substantifique moelle ». C’est difficile. Il a six décennies, il l’a dit clairement. Elle a un peu plus de 40 ans, bien plus visiblement. Elle se cache. 

Et moi j’extrapole sur les rapports humains. Je souhaiterais être à distance égale vis-à-vis d’eux deux.

Salvator est dans le corps et l’obsession du corps est tenace chez les quinquas et les sexas. Satia boit à la lie, un mélange d’exigence et d’exaltation, de passion. Or, entrer en passion est un sacerdoce. Les deux désirs sont-ils les mêmes ? Assurément, non.

mercredi 1 janvier 2020

A l'Encre du désir, IV







Il était une fois, un homme et une femme qui vécurent pas assez heureux, eurent un enfant à la sauvette et se séparèrent rapidement. Ou peut-être vaut-il mieux dire : Il était une fois, un homme et une femme qui se firent beaucoup de mal et continuèrent sous le même toit dans une cordiale détestation réciproque. Ou encore : Il était une fois, un homme et une femme qui se croisèrent à peine, souffrirent chacun de son côté, n’eurent point d’enfants et ne trouvèrent aucun moyen de redémarrer leur vie.

Il y a moyen de multiplier les situations quasiment à l’infini. L’essentiel étant de dire le réel. Parce qu’il n’y a ni prince charmant, ni Blanche Neige et encore moins la fée Clochette.  

J’ai 40 ans, un petit peu plus quand même et, je vis seule. C’est triste, mais pas tous les jours. Les soirs de fête et les jours de déception ; des siens. Je déteste le mensonge et l’hypocrisie, ce qui réduit considérablement les opportunités de vie. Sauf que je déteste aussi, encore, la gloutonnerie et les situations artificielles. Que reste-t-il au final ? Pas grand-chose. Alors tant pis.

J’ai aimé très jeune, longtemps, un homme qui dut, pour me plaire se priver de moments de lâcher prise. Il était H24, beau, propre sur lui, bien sapé et lumineux. C’est insupportable. Je le dis aujourd’hui, parce que j’ai un peu plus de 40 ans, même si je continue à toujours me soigner, au plus près du corps, du visage, de l’aisselle droite, de tout. Même si je ne prête l’oreille qu’à la brillance de l’esprit. 

En fait, très tôt, j’ai décidé que rien de ce qui n’était pas extra-ordinaire ne m’intéressait. Je m’appelle Satiana. Satia pour les intimes. Et je suis en souffrance.