samedi 24 novembre 2012

Tunisie plurielle et ciel bleu

Le corps tendu, les tendons raides, la peau perméable, elle était exposée aux fléchettes des innombrables tensions. Son médecin la prévint, il fallait des bouches d'aération, des soupapes. Changer de direction, balader son regard, la quarantaine et toute cette route. Sauf que les passionnés ne se sentent pas en années mais en désirs.

Toutes ces opportunités de s'en aller, de se refaire, de se construire encore, de continuer son tissage avec des fils nouveaux...Peu d'intérêt, elle ne s'était jamais inscrite dans l'achat compulsif et savait cultiver un bien déniché, l'enjoliver et le solidifier. La continuité, l'amour, le désir de bâtir et de bâtir et d'encore bâtir à croire qu'elle en a été sevrée. La psychanalyse n'est pas vérifiable et elle n'avait rien à vérifier.

Rester, être, être heureuse, donner, inculquer et l'obsession de construire, tant est forte la conviction que l'existence est don de soi et que l'autre est moi.

Elle venait d'une sphère où la femme était entretenue, le mari prospère, l'ascendance aisée. Très tôt, un proche d'exception, très rangé, qui  ne pensa pas un seul jour qu'elle pouvait ne pas lui appartenir lui dit à brûle-pourpoint que plus tard, elle n'aurait qu'à  rester belle et finement apprêtée. Ce fut une mauvaise idée et il ne s'en rendit jamais compte.

Il semble que son féminisme exacerbée vint également de là, belle et finement apprêtée pour un homme et rien que cela, c'était gommer toute sa puissance en gestation, ignorer son bouillonnement intérieur et tout ce qu'elle devinait comme force étonnante en elle. Une folle des livres et de la plume à l'âge du gros bouton sur le nez et des mots à en revendre, des certitudes de nulle part, du répondant en-voici en-voilà et tellement d'aplomb.

Le 6ème du nom ne l'intéressa jamais - son alter ego, car elle le sait aujourd'hui - ne put jamais la mettre en émoi, ni mettre en effervescence ses attentes. Elle s'attela à chercher l'Autre, l'altérité, la différence, la singularité - le prix fut cher à payer.
La différence pour voir, s'ouvrir, s'étonner, comprendre, vivre - mais aussi manquer, reculer, s'abstenir et refuser mais cela c'est pendant, sur le tard et aujourd'hui.
S'ouvrir a souvent été l'équivalent d'escalader le mont Everest avec la  force en moins et les vertiges du risque mais jusqu'au bout, ce qui  fait du trajet une vie avec tout bêtement et tout magnifiquement des hauts et des bas. Des hauts vertigineux et des bas bas. Il n'y a pas d'autres mots. 

Et puis travailler, travailler, se mêler, sortir, écouter, sourire, engager, donner et puis donner et encore donner, et prouver, et donner à voir, et rassurer..."Je suis toi, toi en une couleur mienne". C'était son moyen de se faire reconnaître.

Et puis un jour radieux, un jour électrique, un jour de doutes et d'attentes heureuses, un jour de délire et d'appréhension, un 14. Au diable avoir pensé à quitter les lieux! Joie imperceptible d'avoir freiné une certaine liberté, enfoui un désir de respirer des airs d'ailleurs, un village du Moyen-Age notamment, elle si férue d'Histoire.

Un 14 irradiant,  tous les espoirs et tous les possibles de la terre se redressaient, elle n'aurait plus à écrire uniquement sur le conflit du Proche-Orient, sur des sujets généraux du Nord et du Sud, à peindre une vision idéaliste d'un monde meilleur.Les entourloupes de la honte et une langue châtiée comprise d'une minorité digne de Jean d'Ormesson.

Un 14 mirifique, un souffle rare, des effluves d'une liberté oubliée ou plutôt jamais vécue. La Tunisie lui appartenait, elle en était une citoyenne au sens occidental du terme - une réalité - et elle s'exprimait. 
Soa était emportée, assaillie : informations, réseaux sociaux, coups de téléphone, amis à l'étranger. Et puis, O   au Sud de la France, à vouloir tout saisir, participer, la voir. Un être d'exception celui-là et si insupportable. Un amour mais pour une autre fois.

Et vlan ! Le résultats des élections. Et  Nad qui lui trouvait du bonheur débordant jusque dans son sourire, un épanouissement de tunisienne si fière de son pays. VLAN et puis VLAN !  Les Islamistes aux commandes! Soa est à des milliers de lieux de la pensée islamiste en musulmane de naissance. Un gouffre impossible, une incompréhension initiale. Des attentes si "bassement" et fondamentalement humaines mais une réponse transcendantale, si peu à point, si inconséquente, un delirium de sixième califat alors que l'empire ottoman était si loin et depuis des lustres.

Le désir de démocratie était si intense qu'il fallut s'y faire, le diktat des urnes, la dictature de la majorité, le peuple tunisien et ce malgré cinquante ans de scolarisation obligatoire et toute l'ambition moderniste du maître Bourguiba, en pleine puissance politique. Et presque immédiatement des discours incohérents pour Soa : voile et voile intégrale, sabres et facultés assiégées, polygamie et mariage coutumier, femme complémentaire, prédicateurs de tout poil - c'est le cas de le dire - agressions d'hommes de presse...
Le voile pour s'y arrêter un court instant était aux antipodes de Soa. Déjà que pour elle, oreille, nez, cou et poitrine se valaient, qu'elle était adepte de l'égalité des organes du corps avec un petit plus pour le coeur par égard à sa fonction de réacteur et de pompiste. Et elle savait à quel point les décharges du regard étaient opérationnelles alors les cheveux ! Pour tout vous dire, et en personne libre dans ses réflexions, libre de l'usage de son atout d'humaine : sa matière grise, convaincue que la logique du Créateur lui autorise des routes personnelles, elle n'y adhérait pas d'un iota. Et puis une éducation avec un leitmotiv, le même et toujours, à sonner dans sa tête : ne pas se laisser guider, n'appartenir qu'à soi, cogiter avec le seul  instrument de connaissance certaine : la raison.
Un géniteur croyant et moderne, respectueux et dans la gêne dès qu'il s'agit de trancher sur des notions telles que le destin et la prédestination. Un croyant sans prétention de réponses définitives et qui préconisait l'usage de la raison et de la conviction intime.

Les géniteurs, une histoire d'amour et des marques indélébiles.

Aujourd'hui, le temps a une élasticité très conjoncturelle, les gouvernants s'enfoncent d'incompétences en bévues, de maladresses en erreurs et en bourdes, de fautes en manques de discernement, de non-voyance à l'opportunisme, à la braderie du pays...Soa est au point mort, le discernement est fantasque, le pays est un atelier d'apprentissage, le potentiel laisse à désirer, les voix discordantes, le lèche-bottisme en hausse vertigineuse, le modèle du passé proche pointe son nez, la dépression est générale, et des jeunes meurent et quelle que soit leur obédience, ce sont des jeunes, des Tunisiens longtemps ignorés et longtemps dans l'indignité sociale et professionnelle tant il  est vrai que le travail, le droit, la liberté sont incontournables pour le bien-être de la personne humaine et son désir de vie.

Les forces s'amenuisent, la volonté devient aléatoire, le moral tangue, l'écoeurement est au bout du couloir mais Soa reste debout, se redresse  rapidement, ajuste ses tirs, se fait entendre, hurle son désaccord, affiche son moi.

Une Tunisie plurielle, et pourquoi pas ? Mais halte à ceux qui s'amusent à nous faire faire des embardées dans le sens inverse des aiguilles de la montre. L'avenir appartient à  nos enfants et parce que nous rêvons de vivre en modernité et que le bleu  unique du ciel de Tunisie aspire à  la même chose, pour Soa la  résistance continue.

Une pensée profonde, un respect à la douleur d'un père, honnête homme, qui  perdit  son fils, chef salafiste, tout jeune homme parti pour des convictions, les siennes, mais des convictions et un combat. Une vie fauchée, celle d'un des nôtres se dit Soa, un Tunisien avec lequel elle n'avait aucune conviction commune.

samedi 10 novembre 2012

Barack Obama ou le rêve


L'élection de Barack Obama en novembre 2008 fut une première dans l'histoire de l'Amérique, pays qui connut et vécut la discrimination raciale jusqu'aux années 60. Qu'un Afro-Américain devienne président des USA - le 44ème - a suscité un immense intérêt à travers le monde et un bonheur exutoire pour les Noirs, les démunis de toutes sortes, les férus de l'égalité des chances et de justice, les idéalistes de tous bords.

Nous avons encore en tête les images de ces Afro-Américains chantant et dansant dans les rues américaines des différents états, en plein délire heureux. Un Noir américain à la tête de la plus grande nation du monde est un soulagement, un baume apaisant à des maltraitances ancestrales historiques inexcusables. Nous avons encore à l'oeil, ces très vieux Noirs-Américains en sanglots qui trouvèrent en la victoire de B.Obama sur J. McCain une revanche sur le passé et un sens à une vie largement derrière.

L'homme BO, indépendamment de la machine qui est derrière et parce qu'il y a - comme de bien entendu - la realpolitik et que nous ne sommes pas des enfants de choeur, l'homme a son charme, sa prestance, son charisme. Intellectuel au beau passé estudiantin, grand orateur, organisateur de communauté dans les quartiers Sud de Chicago durant les années 80, avocat de droit civil, professeur universitaire en droit constitutionnel, sénateur des EU et j'en passe, l'homme plaît et les Américains se réveillent avec une icône sur le modèle des géants de ce monde, ce qui les change un petit peu, quand même, du sapeur-pompier tout noué, tout fort, tout bronzé. Et c'est la reprise oh combien belle, oh combien vibrante de cette phrase-phare de MLKing : "I have a dream !"
A partir de là, Obama est hissé au rang des dieux et quelque temps après cette première élection, l'homme reçoit, contre toute attente, le prix Nobel de la paix. De quelle paix s'agit-il, au juste, en pleine guerre d'Irak? De quelle paix s'agit-il, au juste, en plein projet de déploiement de dizaines de milliers de troupes supplémentaires en Afghanistan?

Il s'agit en réalité d'espoirs de paix, d'espérances d'un monde sans armes nucléaires, d'un règlement du conflit prioritaire du Proche-Orient. Oui, l'élection de BO a suscité un espoir planétaire et son discours du Caire en juin 2009, sa tentative de séduction du monde musulman n'a pas réellement réussi, ses efforts n'ont pas été concluants, le conflit du Proche-Orient n'a réalisé aucune avancée mais ses mots ont gardé des traces. Probablement en raison du charisme du personnage, de ses origines africaines, de la couleur de sa peau, de son expérience de travailleur social dans les quartiers pauvres de Chicago, de sa simplicité d'homme et des émotions qu'il sait faire passer. L'icône du public BO est un homme de couleur, issu d'une famille recomposée, ayant l'expérience du travail communautaire, s'étant lui-même trouvé durant une courte période - au début des années 80 - en pleine précarité professionnellement mais un homme qui s'en est sorti grâce aux études, professeur universitaire et surtout rédacteur en chef de la Harvard Law Review, élu face à dix-huit autres candidats, ce qui lui valut une certaine notoriété sur le plan national.
A partir de là, BO apparaît comme le sauveur des défavorisés, lui le petit-fils du domestique des britanniques durant la Première Guerre mondiale, l'enfant sans père, l'adolescent élevé par ses grands-parents. J'ajouterai personnellement l'intellectuel homme de terrain.

Aujourd'hui, BO est reconduit pour un deuxième mandat de quatre ans, sa victoire sur Romney est nette et incontestable. Il la doit en grande partie aux Noirs, aux Latinos, aux femmes, aux jeunes, aux minorités, aux homosexuels, aux démunis qui ne sont pas forcément satisfaits du bilan du premier mandat mais qui lui renouvellent malgré tout leur confiance. Et ce crédit est en soi un don exceptionnel et une attente vraie même si nombreux Américains ont largement compris qu'un président n'a pas les coudées franches et qu'obligatoirement, il hérite de la politique de son prédécesseur, que quatre années c'est, en réalité, et surtout, les 18 premiers mois et qu'avant de tirer sa révérence, il faut aussi baliser le terrain au prochain candidat de son camp.

Que va donc pouvoir faire BO en politique intérieure et en internationale là où charisme, élégance déglinguée et sympathie naturelle ne suffisent guère? Comment va-t-il pouvoir relever les défis nombreux, régler les situations inextricables?
Un bon point d'acquis déjà pour les Américains : la réforme santé qu'il fit adopter dans la douleur et qui permettra à près de 32 millions d'Américains de bénéficier d'une couverture sociale dont ils étaient dépourvus : l'Obamacare qui se poursuit jusqu'en 2014.
Reste l'emploi d'autant qu'on lui a souvent reproché de le reléguer au second plan après la réforme de santé, la diminution du chômage donc, la relance économique, la dette, le logement et le refinancement des prêts pour tous ceux, nombreux qui se sont trouvés embourbés dans la crise des subprimes.
Le défi également comme promis de réduire les dépenses de défense, la fermeture de Guantanamo, le bagne de la honte et prioritairement trouver une solution vraie au conflit - oh combien lourd en conséquences, pour tous, d'ailleurs - du Proche-Orient.
Du pain et encore du pain sur la planche pour Obama. Oui, de gros défis mais assurément moins de tension et de soucis en ce 2ème mandat, plus de latitude opérationnelle même si le congrès est majoritairement républicain.

Quatre années durant lesquelles le maître du monde en bras de chemise retroussés, au regard rieur et charmeur devra en président fédérateur raviver l'américan dream, épater le monde en soufflant de l'espoir et en réinventant des rêves parce que BO n'est pas seulement américain, il a ce quelque chose d'unique qui fait de lui un être universel que l'on suit, que l'on écoute et qui nous subjugue.


Quand le délire nous prend !

J'aime cet homme, il est d'une élégance nonchalante rare. Vif, intelligent, séducteur. M. en est jaloux, oh que je le comprends! Et même Michelle trouve que j'exagère. Peu importe. Il a en lui tout ce dont rêve une femme intelligente. B. pliz, fais-nous vibrer, redore le blason de la politique en nous la donnant à voir comme un infini de possibles.
Grave, ce faisant, ton nom dans l'Histoire de l'humanité en lettres de lumière.
Agite à la tronche des déplaisants, les grandes idées de tolérance, de justice, de respect du démuni, de respect de la terre et de l'identité.
Toi le fils du Kényan, de l'Américaine de souche irlandaise, le frère de l'Indonésienne, toi le sans-religion, l'homme aux idées profondes, le pays de Canaan a besoin de ta notion d'équité pour enfin connaître la paix.
Oh ba ma :) !





lundi 5 novembre 2012

Ecrire pour toi

Pour que mes mots viennent à toi, pour qu'à travers cet infini de virtuels, je touche une fibre inconnue, j'écris. Et en écrivant coule l'attente de l'autre, parce que rien n'est sans cette ondée d'émotions. N'est-ce pas cela même qui fait de mon être ce qu'il est ? 
Et cette quête d'inconnu, cet esprit vagabond, cet élan vers toi si semblable à mon esprit multiple, à mes regards de vie?
Et pourquoi, mon chemin si court, ne m'autoriserait pas, des vues de toi si éclatées, un prisme impossible mais vital à ce qu'on appelle tout simplement le bonheur.
Ecrire a été pour toi aujourd'hui. Tu l'auras sûrement senti.

jeudi 1 novembre 2012

Des uns et des autres

 Juger ou comprendre?

Hédi est tuniso-russe. Le vendredi par amour de son père, il l'accompagne à la mosquée dans le respect et le recueillement.
Dimanche matin, par attachement et estime de sa mère, par respect de sa rupture avec son pays, ses liens familiaux, sa douleur épisodique d'être si loin de ses origines, il l'accompagne à l’église orthodoxe dans le respect et le recueillement. 
Il n'est ni musulman ni chrétien orthodoxe : il est déiste, un choix personnel , une décision prise depuis sa prime jeunesse pour mettre un terme à la cour assidue faite par l'un et par l'autre et parce qu'au final, il aime Dieu plus que tout et sait qu'il peut compter sur sa compréhension. Impartialité oblige.

Samia est musulmane, de plus, imprégnée d'une éducation fortement rigoriste, à cheval sur les principes depuis toute jeune, adepte d’honnêteté et de justice.
A quinze ans, elle promit à sa jeune cousine dont la mère était au coma que ses prières allaient tout faire rentrer dans l'ordre. Elle passa trois nuits entières à prier sans fermer l'oeil ou très peu, certaine de sa ferveur, convaincue de l’efficacité de ses prières et de la clémence de Dieu. La mort très rapide de la mère de K, l'esseulement de cette dernière, la perte de ses repères furent un choc pour Samia et elle eut, suite à cette période trouble, sa première vraie colère métaphysique.
Ses premières lectures philosophiques et plus tard d'innombrables ouvrages mirent un terme à ce qu'elle appelle aujourd'hui sa nostalgie de Dieu et parachevèrent sa marche vers l'incrédulité.
Elle devint une pure et dure de l'agnosticisme et perdit ainsi un être cher qui avait réponse à tout.

Leila est juive de par sa mère et musulmane de par son père. Elle a souffert une bonne partie de son adolescence des chuchotements et murmures de ses tantes paternelles qu'elle adorait. Et bien que sa mère changeât de prénom et se convertît à l'Islam, les problèmes personnels ne furent pas réglés. Encore aujourd'hui, à près de soixante ans, elle ne confie que très rarement la judaïté d'origine de sa mère, sa conversion délibérée et ses scrupules propres, pour avoir violemment dénigré durant l'adolescence les convictions de sa mère et son attachement à ses traditions.
Leila est musulmane convaincue, sympathisante judaïque au fond d'elle-même et haineuse des conflits de confessions.
Elle a une pensée triste et profonde à sa mère tous les samedis de la vie.


Fatma est musulmane, descendante d'une lignée de Cheikhs de renom. Elle a été mariée à seize ans à un grand homme fervent pratiquant, assidu des lieux de prières, proche de son père soucieux, lui, de vite cacher sa beauté, un tempérament rebelle tout naturellement et une ouverture d'esprit inacceptables.
Fatma accepta le prétendant - son père lui posa la question, ce qui était, à l'époque, assez rare - pensant pouvoir oublier dans l'intimité une mère morte en la mettant au monde.
Elle eut trois enfants, mena une vie visiblement tranquille et demanda le divorce à 50 ans, un an, jour pour jour, après le décès de son père.
Fatma eut quelques années de bonheur avec un second mari de son choix, une brève jeunesse grâce à l'amour. Elle vécut les trois quarts de sa vie dans le silence obligé et le respect d'un père autoritariste qui n'envisagea jamais un "non" possible en guise de réponse, un père qu'elle respecta de son vivant et après son décès. Au fond d'elle-même, elle avait une haine de son milieu puritain, des petits matins d'ablutions et de prières et du silence de la grande maison ancestrale. Elle fut l'une des plus belles femmes de son temps et mourut à 55 ans.

Elyssa est de mère suisse et de père tunisien. Après une adolescence haute en couleurs et en frasques, en relations et en ruptures, elle porta le voile et devint donneuse de leçons. Le voile lui alla très bien et ce fut un choix heureux pour elle. Les leçons par contre tournèrent mal : trop de poncifs, d'idées arrêtées et de généralités creuses : "il y a un temps pour tout", "la pureté du corps", "l'homme est un cran au-dessus"... Elle perdit ses amis et ne se remit sur pied que suite à un THS ( traitement hormonal de substitution). Elle confondit ménopause et quête d'équilibre personnel, religion et interprétations abusives.


Ce sont tous des vécus différents, des lignes personnelles, des strates propres.Tous ont eu ou ont toujours un rapport intime au divin, au spirituel. Leur quête se poursuit probablement, ils sont peut-être heureux ou malheureux, en paix ou tourmentés mais qui de nous a le droit de se prononcer sur ce qu'il sont ou ce qu'ils ont été ?
Qui a autorisation de les cataloguer ?
Devrions-nous nous ériger en chef suprême et leur distribuer des billets de bons ou de mauvais croyants à l'instar du commerce des billets de l'Eglise au Moyen-Age et l'octroi de places au paradis ?
Ne devrait-on pas, par discrétion et respect, avoir de l'égard au parcours propre de chacun à ses bonheurs, ses peines, ses chagrins et éviter de se mêler de l'intime ?
Car, en effet, le spirituel est on ne peut plus intime et obligatoirement consécutif d'une pluralité de conjonctures et d'évènements propres à chacun. 

Graine d'Être

Quand nos délires et nos errances broient nos vies, on égare notre liberté.
Quand notre élan vers le désir et la compréhension nous emporte loin de ce que nous fûmes, de ce que nous sommes, on quête le retour de son moi, alentour.
Quand pour l'autre, pour nous-même, nous dévorâmes le temps, dévalâmes les marches, courûmes vers l'océan, le halètement nous prend et au virage du souffle, au seuil de l'oubli, on s'emmêle les pieds dans le vertige de la cadence, le défilé des souvenirs et l'acuité du questionnement.

Le recommencement seul peut faire taire le silence.
Sans cesse, en moi, je puise la graine de vie.

lundi 29 octobre 2012

Conscience et conscientisation.

Il y a des jours où écrire est vécu comme une naïveté. De surcroît en français. Pourtant, par cet acte, on vit mieux. Même si, à l'avenir, je souhaite parler, m'adresser directement à des interlocuteurs, en tunisien, c'est à dire dans notre langue afin de mieux se faire entendre. Il me coûte, pourtant, de laisser ma solitude.

La Tunisie est mon essence même, mon berceau. Je ne me vois plus seule, en tête à tête, avec moi-même, ma plume, mes proches. Il y a besoin et urgence d'aller vers l'autre, celui-là même, qui me trouve souvent inaccessible ou d'une autre étoffe. Je suis toi et il me tarde de te le dire.

Marre souvent des réseaux de com', des vases clos. Une impression de futilité. Des publication identiques relayées sur deux, trois jours, une semaine...Le terrain nous appelle : il y a danger en la demeure par manque de conscience collective des enjeux. Maigre consolation pour nous qui oeuvrons à partir de nos espaces personnels depuis un moment déjà. Laisser des marques indélébiles, quelque chose de solide et de durable. Du calme aussi. A entendre dans le sens de réflexion et de pondération. Insuffisant dans la conjoncture actuelle.

Le délire du 20, 21 et 22 octobre. Comme si la Tunisie allait pouvoir renouveler le 14. Il y a une réalité : le scrutin, la voie des urnes. Ce qui donne la légitimité.

Aujourd'hui, il y a irrespect des échéances. Sauf que le vide est à craindre et puis l'élan est derrière. Le plein est, lui, on ne peut plus, déplorable. Que faire donc? 
Exiger des dates rapides et veiller à ce qu'elles soient respectées. Des instances libres de toute obédience, intimidation ou auto-censure et le terrain.

Et la constituante? 
Il y a le danger de la torpeur hivernale, d'une certaine fatigue, de l'oubli. Il est question du futur de nos enfants et de la souveraineté de notre Tunisie.

Faire que le Tunisien sache que la liberté est un présent d'une rareté extrême. Rester libre donc. Ecoeurement des discours, de la propagande, de la commercialisation du religieux, marre que l'on prenne le Tunisien pour un idiot manipulable à loisir. 
Faire que Ben Ali soit le dernier des dictateurs et préserver cette liberté unique, nouvelle, convoitée par les extrémismes de tout bord et notamment de droite.
La Tunisie n'est pas une propriété privée, on ne peut accepter de vivre sans honneur. Vous n'avez pas le monopole de Dieu.

Ni mouton, ni viande. Laissons le religieux dans l'intimité de notre besoin de Dieu. Personne n'a le droit de s'immiscer dans cette relation si particulière et si personnelle. Prêter l'oreille aux aboyeurs, brader son être pour s'empiffrer de viande, donner à l'autre l'autorisation de diriger ma conscience est un aveu de faiblesse et d'ignorance. Accepter une stratégie de décervellement et manquer de fierté.

Il est grand temps que le Tunisien relève son être et son pays, qu'il fasse le distingo entre le spirituel et le "séculier". Nul besoin de gourou sur le chemin de la foi. Le politique, lui, est tout autre : travail, droit, égalité des chances, dignité. Le vécu, le réel, le temporel. C'est ce qui est à expliquer à nos concitoyens.

Il y a une vraie souffrance à constater que l'élan du 14 - quel qu'il eût été - s'étiole, batte de l'aile.
Il n'est pas question d'accepter une vie de sous-être ni pour nous ni pour nos enfants. Le retard est déjà trop important, insupportable. La marche du monde est tout autre, pourquoi sous-vivre?

La Tunisie est notre pays à tous, la dictature de la majorité est douloureuse. Ma contribution, la vôtre sera d’éveiller cette majorité de lui faire comprendre que politique rime avec blablabla, que l'on est pris pour un idiot à berner et qu'une fois notre voix donnée, on est largué plus bas qu'avant.
II y a du travail sur le terrain, un vrai discours de dignité, de droits, de vie meilleure, avec des besoins d'ici- bas. Nous payons pour accéder à cela.

La Tunisie est un pays pauvre, le chômage augmente à vue d'oeil, l'économie s'effondre, le tourisme est quasi mort, le pays est un dépotoir, un relâchement de tout et de tous est visible à chaque coin de rue.

Nous sommes dans la dépendance économique et les gouvernants de l'heure tendent leurs mains du côté du Qatar et autres milliardaires en mal de vassaux et d'hégémonie. Nous avons cinquante ans au moins d’obéissance et de silence aveugles derrière nous. 
Aujourd'hui que les langues se délient, il est impératif que la réflexion suive que le niveau s'élève et que l'échine se dresse. Bourguiba nous a mis sur le chemin de l'école.

Le Tunisien peut décider de l'avenir de son pays, il le doit à ses enfants et aux générations futures. Un avenir libre de toute démagogie, des entourloupes du passé et de l’abêtissement du Tunisien.
C'est le prix de la citoyenneté vraie.

Pour tout vous dire, l'heure est à la conscience, à la conscientisation de tous. Les fêtes attendront pour l'heure

dimanche 21 octobre 2012

Catharsis.

Quand le "Je" vient à se dévoiler.

Elle a onze ans et s'étonne de la voir pleurer. Fleur a posté une vidéo d'une belle pub sur la nécessité de résister face à l'oppresseur, une pub réalisée à Paris visiblement. On y voit Mehdi Houas, ancien ministre du tourisme dans le gouvernement de BCE. Un excellent technocrate et un homme d'initiatives durant cette période d'attentes heureuses et d'espoirs.
Une pub vibrante dans l'image et le texte.Un non, à en être ébranlé, à tout séparatisme entre riches et pauvres, hommes et femmes, jeunes et âgés, conservateurs et modernistes, instruits et non-instruits, d'ici et d'ailleurs, dans le dogme et affranchis...
Un non au séparatisme qui explose dans une bouche libérée sous peu d'un bâillon rouge protestataire, une marche unie de Tunisiens de tous bords. J'aurais aimé voir Carthage en toile de fond ou mieux La Kasbah ou encore l'avenue H. Bourguiba...ou n'importe quel autre endroit-phare de Tunisie.
Je suis auteur, vous l'avez sûrement compris et tout récemment, une connaissance s'étonnait de me voir écrire hors fiction. Un étonnement étonnant pour plusieurs raisons, surtout celle évidente à mes yeux, sartrienne : peut-on, à l'heure qu'il est, quand on porte profondément les couleurs de sa terre comme un enfant qui meut, comme son pendant de chair, comme un géniteur précieux, peut-on écrire ailleurs qu'ici? Sur le champs des moissons futures?
La Tunisie est en nous, là où nous sommes on ne peut plus vulnérables, on ne peut plus forts. Ce sont des angoisses qui s'expriment hors l'étroitesse du silence. Nous rêvons d'un pays libre et fort, uni et respectueux, généreux et solidaire où la démocratie et ses alternances respiratoires planteront à jamais leurs graines.
Pourquoi, oui pourquoi faire que notre marche soit lente et bête et agrippée au pouvoir et à l'argent? Pourquoi devoir supporter vos sourires de circonstances faux et félins? Vos poignées de mains mielleuses et corrompues?
Pourquoi ne pas emboîter le pas à la marche du monde moderne et éclairé? Je ne partirai pas dans l'ignorance de vos basses ambitions. Je ne finirai pas dans vos convoitises de revenchards.
Je me rêve libre et démocrate tout simplement.

Pensées à toi qui es si loin dans l'inquiétude. Le prix pour grandir est souvent cher.

Billet d'humeur 3 : Pouvoir et griserie




Les démocrates sont en souffrance mais non en inertie. On n'est même plus sous ce qu'on appelle "la dictature de la majorité" suite aux résultats des élections du 23 oct.2011.
L'année a expiré avec zéro ligne définitive d'ailleurs.
Quel est le malheureux secret de cette usurpation de pouvoir que l'on ne trouve que chez les Arabes, les Africains et autres éclairés ?
Pourquoi d'ailleurs faire que le vase déborde et n'avoir pas envisagé une alternative satisfaisante pour tous?
Le pouvoir, ce banditisme pathologique.

samedi 20 octobre 2012

J'ai mal au pays.

"Ne suis-je pas suédoise?" me dit-elle, mi-figue mi-raisin. Tunisienne bien entendu mais le génie du rêve, même conscient, est dans la perspective. Elle revenait du travail. Un bien grand mot : deux nuits par semaine, de l'argent personnel et une plongée dans le monde professionnel avant de prendre de nouveau l'envol vers l'ailleurs. Notre tunisianité est indéfectiblement en nous, nous la portons comme un flambeau et nous la passons par devoir et par nécessité.
Sa chance, à elle, la Tunisienne, c'est qu'elle évolue de par ce travail dans son milieu naturel, cosmopolite, résolument tourné vers la modernité, depuis un moment, quand même. Tunisienne de chez les Tunisiens, quoi qu'on dise et abstraction faite de tout préjugé, elle a la bonne étoile d'être pétrie d'ouverture, nourrie de recul et promotrice de pluralité culturelle.
Oui, nous sommes nombreux à rêver de Lumières pour notre Tunisie, lumières dix-huitièmistes et nous le revendiquons. Et pourquoi pas? Que rêver de mieux? Rationalisme, pensée critique et souffle nouveau. Une autre façon d'espérer avancer autrement qu'en cherchant l'âge d'or dans le passé.

Le pays est si beau dans les photos du petit matin! Tout un chacun est capteur de beauté de nos jours en un clic et grâce au progrès. Le ciel de la Tunisie est unique, on aime le répéter, des rougeurs comme autant de promesses d'un avenir radieux et une mer paisible qui sommeille et s'étire langoureusement. Vous ne pourrez rien contre la volupté de la nature, autant se laver les yeux et purger sa vision et son esprit.

Sur la route de chez elle, c'est tout autre chose et au matin, il est difficile de tout voir rationnellement, c'est à dire, ici, politiquement et socialement. Il est difficile de sortir le faisceau "compréhension", "réalisme", "réel". Il y a encore trop de torpeur. De part et d'autre.
Elle voyait partout ce qui s'appelle maintenant "La révolution parallèle", celle des poubelles : des égorgées, des déchiquetées, des jetées, des explosées...Il y en a pour tous les goûts et selon toutes les bourses. Qu'à choisir!
Poubelles et herbes hautes de plus d'un mètre tout le long d'un parcours qui fut presque léché, il n'y a pas si longtemps afin que Ben Ali et sa femme oublient jusqu'au sens du mot détritus. Et l'oubli est précisément le glas du pouvoir. 

Faites que votre oeil soit une caméra, c'est possible. Focaliser là-dessus, c'est faisable. Pensez au 14 et à son ivresse exceptionnelle et vous vous direz dans les vapes matinales qu'au final tout n'est que poubelles alentour. Pourquoi? C'est comme qui dirait une vision trouble, un hiatus entre espoir et réel.
Cela dégorge, de partout. L'élan des premiers jours est déjà histoire ancienne : le nettoyage des boulevards, les civilités, les queues devant les boulangeries. Le sursaut du dépressif chronique qui n'aspire qu'à la liberté afin de pouvoir de nouveau nous faire du chantage inconscient? 
Oui, la conscience est à appeler.

La femme est hurlée pute au volant, un classique désormais. J'écris le mot en toutes lettres malgré une retenue habituelle pour tout simplement donner à voir et lever le voile sur des pratiques très courantes.
L'homme post-14 a un regard désapprobateur, moralisateur, un tantinet pincé celui-là. Dans le meilleur des cas, hautain. Il est "ébranlé" dans son mental, tout nouveau, importé du golf, la mode de l'heure de Monsieur tout le monde que l'on croise fréquemment en faisant ses courses. Opportunisme ou stupidité tenace et indécrottable? 
( Même "Echaab" arbore barbe et gandoura. C'est un trentenaire de par ici, clair le jour et hurlant ses revendications sociales dès 18 heures à l'heure où il prend son service de gardien de nuit d'une vieille propriété, purgeant ainsi déficit social, douleur rentrée et eau-de-vie. )


Ma terre a-t-elle hurlé pour cracher et déféquer sur la voie publique?
Je me console à y voir une dépression provisoire, un lendemain de désenchantement passager, mieux une transition.

Je suis dans la tête de cette jeune personne, rayonnante de naturel et riche de pragmatisme, portant, malgré tout, très haut le rouge et le blanc de son humus natal.C'est une Tunisie aussi que vous le vouliez ou pas, libre et tenace, jamais dans le moule et en permanence dans la liberté de penser.
Tout a été dit dans la fougue des jeunes de 20 ans mais aussi dans le refus du statique, de l'immobilisme. Nous sommes loin de la Suède, assurément, nous sommes nous : un potentiel humain indéniable, une volonté farouche de résister, un refus réel d'assister au projet d'ancrage d'un modèle de société bien plus que déplacé : ni d'orient ni même d'occident fût-ce la Suède. Notre volonté : un pays démocratique respectueux de la différence et prônant l'ouverture.

Lave tes yeux de l'avancée des autres, cet humus est le nôtre, les immondices ne prendront qu'un temps, si tu t'ériges en tunisienne, debout, à l'écoute et prompte à la réponse, criant ton mal à la ronde et oeuvrant pour la construction d'un édifice nouveau porteur d'alternances, de différence et d'équité.

Ce sera porter et bien porter sa tunisianité.


vendredi 19 octobre 2012

Marzouki

Point de vue

Un excellent entretien avec les journalistes, un président fédérateur, un droit-de-l'hommiste et un féministe visionnaire selon moi, mais oh combien sans pouvoir réel et oh combien dans sa bulle ! N'empêche en tant que penseur, il est à des années-lumières des islamistes. Ce que je pourrais apprécier c'est précisément le décalage de niveau intellectuel entre eux, quand bien entendu je me limite à la théorie. Sauf que la Tunisie de l'heure a besoin d'action politique, les idées ne manquant pas notamment, bien sûr, chez les démocrates.

lundi 15 octobre 2012


Barack, BJ et mwi 



Le choix de Barack Obama pour les cours de français se fit sur moi. C'était un vrai chanceux. Au départ, il s'agissait uniquement de travailler sur le lexique politique, les termes correspondants en français usuel. Il fallait éviter le registre de langue soutenu et focaliser sur le courant.
Barack Obama voulait s'essayer également à l'humour européen dans le choix des mots, les boutades, les clins d'oeil ( comme s'il y avait un humour spécifiquement européen, et comme si Barack Obama allait composer avec le vieux continent devenu quasiment le tiers monde aux yeux des yankees ! Bref, un délire, la logique est donc autre.)
Au départ, les cours étaient un vrai casse-tête pour moi. Je ne m'épanouissais pas dans le littéraire, L'historique, le philosophique et BO n'était demandeur que de terminologie. Jusqu'au jour où par un détour inattendu, je lui fis la remarque classique haïe par les Américains : " vous n'avez pas d'Histoire en comparaison avec le reste du monde". BO en fut coi. Comment osai-je? J'osai. Et même plus loin.
J'avais devant moi un apprenant en colère qui se défendait avec la fougue d'un Africain ou presque. Les cours prirent une autre tournure, bien plus intéressante. Et ce fut la littérature, l'Histoire, la mythologie, la philosophie. Peu évident pour un pragmatique mais c'était ignorer l'énergie exploratrice de Barack.
Au final, les deux heures hebdomadaires devinrent quatre, deux séances taxées à 100 dollars US de l'heure ( le rêve de tout professeur qui se respecte! ) Et Barack apprenait, posait des questions, retenait, établissait des parallèles, critiquait pour souvent s'apercevoir que le génie de l'Amérique était précisément la pauvreté historique. L'Amérique ne s'était jamais encombrée d'un passé pesant, handicapant. Elle était légère, tournée vers l'avenir, volontaire et tout ce que firent les génies américains venait de là.
Je faisais de BO un apprenant heureux, plein d'appétit et plus je multipliais les démarches pédagogiques, plus je mettais de l'originalité dans l'abord des connaissances, plus il adhérait. Ce fut là que naquit l'idée de lui parler d'un petit jardin où jadis s'amusèrent de grands Carthaginois.
''Barack, lui dis-je un jour, je viens d'une parcelle de terre d'Afrique du Nord dont tu as entendu parler cet été par un de nos illustres hommes politiques, un octogénaire aux yeux bleu occident qui te plut d'emblée et qui te sussura à  l'oreille bien des choses, d'ailleurs je ne sais en quelle langue mais il semble que tu n'as pas trop prêté l'oreille tout à ta réélection. Barack, je vais jouer de mon ascendant de prof sur toi pour un petit peu te mettre au courant de ce qui se passe à Carthage : ça merdouille, pour utiliser un mot familier - l’Américain ne s'offusque guère de ce genre de détail, la préciosité n'ayant pas fait parti de son peu d'Histoire et l'élégance verbale ou, l'élégance tout court, ne lui semblant pas vitale.
Les femmes sont toutes de noir vêtues jusqu'aux ongles, les hommes de blanc oriental - peu immaculé certes mais bon ! - les enfants portent des bandanas avec inscription et épée, le discours est confus. Banane veut acheter les anciens biens de Leila - elles se ressemblaient trop, tout dehors, rien dedans.
M. AE tombe dans les bras de Morphée à même la paillasse. Au Bardo, nos élégantes députées, par ailleurs dans le souci tout l'été pour tous les mariages ratés par manque d'eau et de vaisselle lavée, aèrent leurs parfumés pieds de leurs babouches dorées. Elles projettent même de construire des hôtels dans les parages de L'ANC. Nos sages penseurs tous d'idées éclairés préconisent l'application d'une politque de santé mise en route par palier. Que d'idées dans une Tunès qui va droit à la paix sous les yeux du monde entier..."
Et j'allai crescendo, du détail au lourd, de la description à l'argumentation, du poisson au pigeon, quand je vis une larme perler à l'oeil de mon élève. Barack était fortement ému.

'' Madame me dit-il - bien qu'il soit plus âgé que moi, j'ai tenu à cette distanciation nécessaire en pédagogie mais qui n’empêche en rien de véritables échanges - Madame, BJ me l'avait dit mais je n'avais rien compris, un risque fut pris quand je livrai le pays à ses pires ennemis,  ne laissez pas le dépit vous gâcher la vie, rien n'est fini et les dés seront remis sur le tapis.''

Tout fut dit sur un ton raffermi et je compris que désormais je pouvais compter sur mes acquis pour prétendre à des séjours gratuits aux Etat-Unis ( le rêve !! ) d'autant que mon apprenant en mesurait le prix.
Je compris que BO allait se charger de mon pays pour y faire régner l'harmonie afin que le ''14 january'' ne soit pas peine '' perdie'' coumme on dit, hélas, aujourd'hui.

Dimanche, 6h30, une chaleur d'août. Barack? Pas la moindre trace. Et l'Hisoire alors? Les cours? La White House ? BJ? La Tunisie? Pour l'heure que du dépit ! En attendant l'envol de BJ aux E-U. 

;)

samedi 13 octobre 2012

Billet d'humeur 2

Le rapport au corps est si fort dans le monde arabe qu'il est au centre de tout, sa première victime est tout naturellement la femme, vue depuis des lustres comme uniquement un corps - appelé, par ailleurs, autrement dans le subconscient arabe sauf que pour ma part, je reste à cheval sur le principe de courtoisie - , un être de second plan, une enfanteuse. Ce dernier statut est supposé être honorifique et vous noterez les Om Galal, Om Omar et Om Bilal...Le correspondant masculin existe mais c'est sans compter le privé, le strict privé où Abou Galal devient esclave d'une danseuse du ventre ou de n'importe quelle autre Eve qui se limite d'elle-même au corps.
Le corps, un sujet tabou d’obsessions diverses qu'il faut savoir draper et encore draper et toujours draper.

Et dire que ce sont des pays chauds !

lundi 8 octobre 2012

Billet d'humeur 1.

Profondément fière d'être de chez moi, il m'arrive de déprimer grave parce que je ne verrai pas dans mon pays le civisme se généraliser. Il y a l'espoir, bien sûr, les fluctuations de l'heure depuis le 14 janvier, le bouillon de cultures...
Bon, du baume au coeur, les philosophes des Lumières étaient tous morts quand la Révolution eut lieu ! J'ai au moins la certitude d'une chose : ma prétention.
;)

mercredi 3 octobre 2012

La plume se meut. Un silence hébété et un crâne qui n'en peut plus d'entasser des mots et des maux jusqu'au point, jusqu'à la virgule. Et tellement d'exclamations. Je porte ma tunisianité comme un flambeau mais que de coups. C'est la chute d'une si belle crise, d'un emportement sans égal, un janvier de rêve. Je vois défiler la laideur, la bêtise, le pas aveugle, une régression vertigineuse sous couvert naif - mais pas tant que ça - de moralité certaine, de positivisme facile. Jusqu'à l'écoeurement. Mais, là, que des hommes qui ne sont que queues occupent la scène, salement, bêtement, je me lève et hurle ma douleur de voir mon pays souillé de leur déjection de connards. Et de nouveau, je dore ma tunisianité de ma fierté de toujours, de mon refus d'assister, sans mots dire, à l'expansion de la bêtise.
Je pense à mon taxiste si confiant dans la justice des hommes, je pense à la candeur d'une scientifique-voisine qui sourit dans l'inconscience à un avenir incertain, je pense à ce bouffon plongé dans le décolleté de l'Italienne entre désir et bienséance, bestialité et peur, masculinité et Transcendance cherchant en vain des regards compréhensifs. Elle n'a rien vu habituée à se voir en être intelligent, pensant. Il n'a rien compris dans sa pratique quotidienne de penser avec son organe.J'ai vu la nécessité de reprendre la plume et, à l'avenir, ce sera les taxistes, le plus possible, pour un échange aimable mais surtout de "marquage" et d'épuration de préjugés séculaires.
A très vite, ça déborde de partout. Que de choses à vous dire!

lundi 23 avril 2012

La FIV démocratique


                                                        

Des allégations diriez-vous ? Nous en convenons. Des allégations doublées de convictions personnelles.
Le concept de non-ingérence dans les affaires politiques d’un pays tiers est un concept creux. Le printemps arabe l’est aussi. A ceci près qu’il l’est dans son déclenchement mais que son évolution, elle, lui est propre et qu’elle mène son chemin dans les soubresauts prévisibles.
Dans le même ordre d’idées, l’évènement de la démocratie : une gestation difficile mais nécessaire historiquement. Sur décision américaine mûrie, probablement, depuis longtemps, et, confortée dans son faire par l’échec de l’expérience américaine en Irak. Il en sera autrement désormais : le projet démocratique du monde arabe se fera sans intervention militaire américaine, avec son peuple et toutes ces composantes, avec le retour de l’entité islamiste en exil, avec l’exercice de toutes les institutions et avec une société civile qui a tout le potentiel de s’inscrire en faux. Les Américains se sont «  plantés » en Irak, on n’impose pas, on ne greffe pas en usant de violence un modèle venu d’ailleurs, sans être sûr de son imbrication possible, sans faire participer les premiers concernés eux-mêmes : « les gens » du pays. La Tunisie sera le premier laboratoire expérimental d’une FIV démocratique. Aux commandes, les islamistes réintroduits chez eux parce qu’on peut guérir le mal par le mal, parce que le pouvoir corrompt tout naturellement, parce que le pouvoir et l’argent sont indétrônables, parce qu’il faut en décharger l’Occident et offrir à ces ex-exilés et un espace d’action et une filiation aux concepteurs du projet qui se fera d’elle-même de toute façon. Le monde arabe fera l’apprentissage de la démocratie. Un chemin probablement long - sous l’œil américain bien entendu – tumultueux mais jusque-là non sans intérêt.
Le choix de la Tunisie est un choix stratégique, géostratégique, historico-stratégique. Les dimensions sociale, culturelle, humaine s’y prêtaient également. La greffe était possible et les intérêts américains à moyen et à long terme ne sauraient attendre. Le bain démocratique en Tunisie est notre réalité d’aujourd’hui, du moment, de l’heure. La « bête monstre » réprimée depuis des décennies est « réhabilitée » chez elle, impliquée directement. Elle parle une langue nouvelle, celle des accords, coût de la gouvernance. Bonne ou mauvaise ? C’est ce qui reste à démontrer. Pour l’heure, ce qui échappe au parti aux commandes, ce sont précisément ses hommes qui restent eux dans la naïveté du discours originel loin de la politique politicienne.
Le tour de passe-passe a émis des signaux et le clan Ben Ali-Trabelsi a été vertement tancé, des signes avant-coureurs de disgrâce ont été envoyés mais ils n’ont pas su les décrypter. Ils ont été jusqu’au défi dans l’aveuglement du pouvoir. Un tout petit exemple, parlant en lui-même, les derniers mois du régime Ben Ali : "la dent" du pouvoir tunisien contre l’école américaine. Quand un pouvoir perd sa perspicacité politicienne, quand il oublie que la souveraineté est malléable ( la realpolitik : dure réalité, bon gré mal gré ) quand il n’a ni l’argent ni l’arme de discussion, il saute. C’est l’ordre du monde et tout bêtement la loi de la jungle.
L’intérêt de ce nouveau « faire » américain est qu’il a su tenir compte cette fois-ci des caractéristiques des pays en mal de démocratie. Il a su se dévêtir de ses atours de cow-boy, de son lasso, de ses éperons. L’intérêt de l’expérience tunisienne est le melting pot du tissu social et intellectuel. Il serait trop facile de ne voir que deux camps : les conservateurs d’un côté et les démocrates de l’autre. Il y a tous ces dégradés forts intéressants à voir et à étudier. Et c’est probablement là qu’il y a à faire pour principalement faire passer l’idée  que modernisme et islam ne sont pas antonymiques. L’intérêt du laboratoire démocratique tunisien est qu’il se fait in vivo, ici et maintenant. Nous sommes directement acteurs et l’avenir sera à la taille de nos actions. Il s’agit de faire réussir cette FIV en œuvrant pour et en mettant tout en œuvre.
Rien n’est gagné. La société civile, ses actions et ses réactions sont d’une importance capitale.
L’opposition, sa teneur, sa force de conviction, son travail sur le terrain, ses prises de position seront décisives. Enfin, le 4ème pouvoir sera le poids-clé dans cette phase de transition. Sa liberté est indiscutable. Le danger pour lui sera sa dépendance vis-à-vis de l’argent avec le projet de privatiser les moyens d’information.
La culture démocratique se fera surtout par l’éducation qui doit exiger d’être autonome, qui devra secouer tous les jougs. Terrain glissant cependant.
Les mécanismes de la démocratie ne s’installent pas en un jour, en un an. Il est fort probable que les quadras, les quinquas ne verront pas de suite l’alternance des pouvoirs différents, le roulement démocratique varié.
Il faudra du temps et du sur-terrain car on l’a vu le peuple tunisien manque d’argent et donc forcément de recul, il manque de culture et d’éveil politique au vu de la jeunesse de sa république et de son histoire (républicaine), il manque de lecture et de sens critique.

Malgré tout et quand on arrive à vaincre ses angoisses personnelles de vie et de mort, quand on oublie le passage du temps, quand on fait face aux tentatives d’intimidation de ces étonnants hommes à robe qui gagnent à trouver un emploi et une régularité de vie, quand on se trouve à espérer – ou à deviner – que le report du prononcé du jugement définitif du ridicule procès Nessma prévu le 3 mai - date de la journée mondiale de la liberté de la presse – n’est pas pure coïncidence, et bien, dans ces cas-là, on se rend compte malgré tout qu’il n’a jamais été aussi intéressant de vivre en Tunisie et d’assister en direct à l’accouchement de quelque chose.
Irons-nous jusqu’à dire merci oncle Sam ?
Peu sûre. Car le résultat final dépendra de notre implication, de notre engagement, de notre action, nous les vrais démocrates, nous la société civile afin que nos enfants aient droit à la modernité.

dimanche 1 janvier 2012

Bonne année à vous tous ! On reste vigilants !


L’homme positif est de toutes les fêtes, de tous les bonheurs, de toutes les occasions d’être heureux. Ce n’est point là que nous allons nous lancer dans un texte d’idées sur l’importance des célébrations depuis le début de l’humanité. Trop lourd pour l’occasion.
Nous fêtons et nous fêterons le nouvel an par positivisme et parce que la vie est courte. Nous fêtons et nous fêterons le nouvel an parce que férus d’espoir et de joies, nous savons que la vie est fantastique et l’imprévu brutal.
Bonne année donc aux oubliés de la société. Bonne année aux malades et à tous ceux qui sont dans l’attente de la vie. Bonne année aux plus démunis et aux nécessiteux parmi nous. Bonne année aux amis et aux proches qu’on aime tant. Bonne année à la Tunisie meurtrie et malmenée en lui souhaitant de mieux se porter en 2012.
Bonne année à notre chère Tunisie que l’on suit pas à pas dans sa reconstruction, qu’on a accepté de voir entre les mains du camp adverse, à qui on souhaite et surtout à qui on veut, des traditions démocratiques et une alternance du pouvoir.
Bonne année aux nouveaux dirigeants que l’on a à l’œil, qu’on observe à la loupe gérer le pays, dont  on suit le pas et dont on décortique le propos.
Bonne année à l’Assemblée Constituante à qui on rappelle qu’elle a pour mission de rédiger un destour, responsabilité principale qu’elle semble oublier tout occupée à dispatcher les portefeuilles ministériels et les représentations diplomatiques. Bonne année à l’AC qui a juste une année pour asseoir les bases de la 2ème République.
Bonne année au Dr. Marzouki auquel on rappelle qu’un intellectuel, un vrai, un droit-de-l’hommiste est un espoir pour les sociétés désireuses d’avancer et de happer la lumière. Auquel on rappelle qu’un vrai intellectuel ne se vend pas, reste fidèle à ses idées et ne laisse pas le « pouvoir » le corrompre.
Bonne année à la valeur la plus sûre : le peuple tunisien, courageux, volontaire et fort. Le peuple tunisien avec sa société civile si avertie aujourd’hui, alerte et prompte à la réaction et à la dénonciation. La société civile, richesse incommensurable, œil ouvert à l’affût du moindre dérapage, de la moindre démagogie politicienne. Un peuple tunisien appelé à rester vif et actif, vigilant et réactif, libre et souverain.
Bonne année à vous tous, auteurs, penseurs, journalistes, homme de presse de tous genres, intellectuels, universitaires, opposants, votre intelligence et votre verve font plaisir à voir. Grâce à vous, on sait d’emblée qu’il n’y a plus de silence possible. Grâce à vous, on sait stricto sensu que nous serons de toutes les décisions, attentifs à toutes les manœuvres et les tentatives de récupération.
Bonne année à la RTT, ou à TV7 ou récemment à La Nationale, nous savons votre historique, votre « souplesse » selon le « souverain ». Nous vous rappelons que nous payons nos contributions et qu’on exige que vous arrêtiez de verser du Si Hamadi et du Cheikh Ghannouchi en voici en voilà, que vous respectiez une déontologie de base et une neutralité de rigueur. Parce que écœurés de vous voir vous payer nos têtes et vous farcir notre argent. NON, à une chaîne publique écho du pouvoir en place, lui-même de passage.
Bonne année à vous tous qui êtes responsables de l’avenir de la Tunisie qui ne se fera qu’avec l’équilibre du poids et du contre-poids.
Tant il est vrai que le cœur est à gauche et que la rue reste l'agora de toutes les contestations.