lundi 8 avril 2024

Vivre pour soi, dans la dépendance

 Récit à la première personne









Je posai le livre sur ma table à roues, celle qui me suit partout où je vais dans ma forge. Parce qu’il y a dessus tout mon nécessaire de chaque instant. 

 

 

Il me tint tard, éveillée, hier nuit. Incertaine, interloquée.

 

 

Ma PDA m’appela de l’autre côté du bassin. Elle travaillait sur les différents types d’écrits à la première personne : l’autobiographie, l’autofiction, les fragments, les mémoires, le journal intime … Elle était très pudique, mais elle a vingt ans. Elle me lut un texte absolument saisissant. 

Je compris que je perdis ma fille. Elle ouvrait des portes, de plus en plus de portes, dans une sorte de profondeur vertigineuse. Une sorte de mise en abyme me dit ma Div. à qui j’en parlai. 

 

 

Elle disait le rire enchanteur, la force incontestée, l’engouement et l’impact sur les autres. Leur désertion dès l’instant où ils boivent votre joie apparente. La solitude derrière ce bonheur contagieux, l’absence de questionnement des autres sur soi … Elle était différente, disaient-ils. 

 

 

Mais quel en était le prix ? 

 

 

Elle ouvrait encore des portes, innombrables, les unes après les autres, au point où je me demandai si je la sondais comme je le croyais … Elle coupait le cordon tous les jours un peu plus et je laissais faire par admiration de son besoin de liberté absolue et soudaine. 

 

 

-     Entre le livre que je lis et toi, je suis égarée ! lui dis-je. C’en est trop pour moi. 

 

 

J’écris à ma libraire sur son WhatsApp.







Je n’écrivais pas la sexualité, jamais. Je la suggérais. Oui, c’était possible. 


Mais, il n’y avait pas que cela, il y avait tout le reste. La densité, le référentiel, la dimension philosophique et psychanalytique. La déification de l’autre -  dont je ne pouvais être une adepte. 


Il y avait le ton cru, sans vulgarité, peut-être. Assez exhibitionniste, peut-être aussi. Ou alors, tout l’enjeu était une question de différence de génération. Je n’avais aucune information certaine. Et je n’aimais pas me pencher sur les biographies. 

 

Le livre me dérangea-t-il ? 


Il me saisit et me dérouta. Je détestai la relation amoureuse, c’en n’était pas une. Une dépendance, un esclavage, une possessivité pathologique, une addiction, un amour de soi exclusif … Oui.

 

Ce n’était pas moi. Je n’aimais pas la douleur ni faire du corps un autel, une consécration. Et encore moins un réceptacle irrévérencieux.  


Mais alors ?

 

Une belle écriture. Des questionnements métaphysiques intéressants à la fin du livre. Une force de dépassement dans la confusion psychique et l’addiction à l’autre. 


Une volonté inconsciente de mettre l’autre sur un piédestal par amour de soi - au final - et suffisamment de perspicacité pour le savoir profondément. 

 

Il y a aussi les crises au sens psychique. Ces épopées de soi comme autant de drames, de tragédies - dans les cas extrêmes - où on troque son ordinaire contre un ou des instants mythiques avec le kaléidoscope émotionnel qui va avec, classiquement. 


C’est un temps élastique avec un incipit, des péripéties, du pathos et une chute vertigineuse. 


Oui, il y a aussi ce besoin existentiel de mythification. 

 





























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