dimanche 14 avril 2024

Hannah A. et moi, 2


Ce bout de la Bleue que vous m'avez offert ... 









 

 

Nous parlâmes assez intensément, de l’appartenance, de la liberté, de l’âge et de ses impératifs, de ce que nous fûmes, de ce que nous sommes devenus et pour ma part de ce que j’ai résolu d’être.



 

-       Mais là, vous êtes au-delà de tout.

 

-       Et quand bien même ?

 

-       Vivre caché est chose ardue.

 

-  Je vis seule, avec les miens, avec les libres, avec les livres, la philosophie, ma communauté d’esprit, les tourmentés ... Je tiens les bride-au-cou, les détenteurs de vérité absolue, les zoïles fréquents, les simplets, les faux-aimables … à distance. 

   Parce qu’il y a un âge où on arrête de se faire du mouron pour le devenir du monde. On fixe nos priorités, nos plaisirs, notre équilibre. Et c’est très bien.

 

-    Peut-être que je n’ai pas réglé certaines questions de mon enfance et de mon adolescence … Peut-être que le monde actuel me fait très peur … Peut-être que je ne sais plus qui a tort de qui a raison … Peut-être que la déchirure, le départ précipité, mon école, mes amies me manquent et que tout cela ne s’est pas résorbé … Les odeurs estivales du matin et la voix tremblante de ma mère …

 

-     Je vous comprends. Placez-vous du côté de l’humain. Ce sera plus aisé d’Être.

 

-       Je crois justement que je me place du côté de l’humain.

 

-       Voyez-vous, vous ne pouvez vous charger du poids du monde ni de la folie des hommes. Ils font de tout ce qui beau et poétique, un calvaire. Depuis des milliers d’années. La plus belle des idées est devenue source de séparatisme. Alors que c’était destiné à rassurer l’homme en proie à l’angoisse de la mort. Inéluctable celle-ci. Dès qu’ils s’étaient mis à codifier, à conceptualiser, à écrire et à instrumentaliser, ils avaient ouvert grande la porte des Enfers. Et nous y voilà.

 

-       Nous sommes peu nombreux à être rationnels. 

 

-       Mais nous nous entendons, assez rapidement.

 

-       C’est un enclos. 

 

-       Et c’est très bien. Je m’y sens bien, je m’étire, c’est heureux. 

 

-       Vous avez réglé vos vieilles marques visiblement. Pas moi. 

 

-    Faites-le. Ce que vous recherchez est en vous. Quelquefois bien enfoui. Faites-le remonter à la surface, faites-le s'épanouir. Les jointures s’uniront et ce sera assez compact et dense aussi. Je vous le répète, il y a un âge où on doit savoir être le maître d’œuvre de son équilibre. Il n’y a qu’une seule chose qui vaille après cinquante ans : être juste, être un Juste et vivre en paix. 













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