Il est temps de revenir aux mots
Dans notre si belle époque, lol, xd, ptdr deviennent des mots-phares en communication.
Que c’est beau ! Pourquoi s’étonner de se sentir étranger ?
C’est un mélange de constat, d’analyse et de dégoût, mais cela ne devra pas durer puisqu’Ontos exige de vous un objectif existentiel, voire un esthétisme sine qua non à votre propre continuité.
Autrement, nous sommes tous des vers de terre, chacun sur sa route.
L’Étrange histoire de Lady Lou
Voilà une bien jolie fille, avec une silhouette fine et assez longiligne. Elle avait un sourire charmeur et une bouche rieuse et généreuse. Dans sa verdeur, elle était toute tendue vers la connaissance de la vie et de l’amour avec un appétit appréciable. Avait-elle quinze ans ? Dix-sept ans ?
C’était si loin et si peu important au final comme tellement d’autres choses. L’adolescence, les hormones, cette force de l’être et du corps en ce temps particulier nous propulsaient - nous propulsent - vers la curiosité, la découverte des expressions physiques incontournables et dévorantes et on place l’amour au-dessus de tout.
Les mots sont si nombreux, leurs combinaisons illimitées,
les époques plurielles,
notre évolution psychique si vraie,
le déterminisme silencieux, indubitable,
que l’on peut dire aujourd’hui,
parce que les seize ans sont bien loin,
que l’amour est l’amour de soi,
que le corps a besoin de s’exercer, sous la poussée des pulsions, ensuite du désir, et puis du recommencement.
L’amour, ce mot si trouble, si fondateur, tellement régénérant, l’amour physique principalement, et d’en faire son moteur de vie. Les trois-quarts de notre vie y passent et on se rend compte, sur le tard, que nous avons beaucoup souffert, beaucoup pleuré, beaucoup gaspillé d’énergie pour un fonctionnement corporel qui n’est pas l’entièreté de l’Existence.
L’âgisme, dit la psychologue à son psychotique, fou et génial en même temps. Paradoxal, mais pas tant que cela.
Dans les années 2000, elle avait une cinquantaine large et Lady Lou se débattait dans la boue. Avec sa psyché de seize ans, chaotique, mais avec la curiosité de l’amour en moins. C’était une personne avec un esprit en pièces de puzzle absolument pas ajustables, en morceaux, dépareillés, disparates. Son regard avait au fond de ses prunelles quelque chose d’égaré, de perdu, d’imprévisible.
Elle buvait toutes les tragédies de la vie comme un buvard d’encre et n’avait pas toujours la latitude de les nourrir de philosophie. Ce n’est jamais très aisé d’admettre l’absence physique de ceux qui ont été des piliers dans nos vies, convenons-en. Mais la force de l’homme réside, précisément, dans sa capacité à avancer, à fabriquer du sens, à nourrir sa vie, à se propulser, à ne pas quitter la partie … tant que la machine continue à fonctionner à peu près correctement.
Sans cela, toutes les libertés sont envisageables, même les moins belles.
Lou était un être d’égarement, d’inconscience et de chocs non amortis. C’était ainsi.
Un jour, elle prit rendez-vous avec sa psy et lui confia d’un trait sa vie avec l’homme qu’elle aima par-dessus tout. Un ton haletant, des mots comme des coups de marteau sur son propre crâne et une émotivité extrême.
Je suis liée à un être tout enduit d’huile. Je vis des coups depuis mon plus jeune âge et je ravale. Un homme de trahison. Jusqu’à la seconde, à laquelle il demanda de lui enduire son dos souffrant de crème apaisante. Jusqu’à la voisine qu’il couve des yeux, en l’aspergeant d’un bonjour mielleux tous les matins. Mon amie d’antan qu’il tenta de piéger, mais qui ne lui accorda que peu de choses à mon avis. Elle avait saisi sa puérilité, je le crois.
Il voulait exister contre notre accord de base, de respect et de fidélité. Je ne suis pas très équilibrée, j’ai souffert, mais j’ai été une vraie épouse et une bonne mère dans mon désordre global.
Je veux tout casser, mais le regard social est une épée coupante. Je suis harcelée et j’harcèle.
Comment continuer ? Comment partir et poursuivre le un-quart de route seule ?
La première fois, j’avais trente-cinq ans, j’étais belle et j’avais de beaux enfants et il avait besoin de croire en lui. C’était lancinant. Et puis, ces hommes ! Détestables avec leurs cervelles valsantes ! Tout ce qui lui importait, c’était de se sourire à lui-même, je suis quelqu’un, un séducteur et un tombeur … Le mensonge fait partie de son tissu épidermique, complètement ! Tout ce qui l’anime, c’est le besoin de regardez-moi-je-passe, regardez-moi-je-suis !
( Elle déglutit et reprit de plus belle )
Notre relation est haine complète, dégoût, mais aussi besoin de vengeance. Je ne peux plus faire semblant et je l’ai fait presque toute ma vie. Je suis déséquilibrée, mais il l’est aussi depuis plus d’une décennie. Je n’en peux plus ! "
La psy ne savait pas trop quels mots choisir. Elle faisait mine de s’approfondir sur le propos, dans le silence. Mais en vérité, c’était tellement clair à ses yeux. Un homme demandant à une jeune aide de le masser, c’était illico à la benne de la petite histoire. Mais elle avait en face d’elle, une femme dans la fragilité extrême, l’émotivité imprévisible et elle était formée pour dédramatiser et mentir.
Certaines cassures sont fatales, pensa-t-elle, en son for intérieure. les Braves sont extrêmement rares.
Qu'allait-elle lui dire, sans un millimètre dans la distanciation requise ?
( A suivre )
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