Carthage, le 5 septembre 22
- Je me suis épuisé, lui dit-il. Je voulais aider, structurer, corriger, réparer les fêlures bêtes et gratuites. Je tendais la main pour aider à se relever, je donnais, j’orientais le regard vers ce qui avait de l’intérêt, vers le potentiellement beau.
- Pourquoi faisiez-vous cela ? Pourquoi ce don de soi ?
- Je ne sais pas. Ou plutôt, je sais. Pour le partage, oui, je le crois. Parce que j’ai eu beaucoup de chance de mon côté.
- Oui, mais vous étiez dans l’excès.
- Je n’en avais pas conscience plus jeune. J’étais très fort, j’avais beaucoup d’énergie. Plus je tirais, plus je trouvais. J’avais une source d’enfer, quasi intarissable. Au summum de la vigueur physique, on ignore la carence et je n’en avais jamais eue, d’aucune manière.
- Vous regrettez ?
- Non, parce que vivre n’a d’intérêt que dans le partage, l’aide aux autres. C’était aussi partie intégrante de mon travail. Bien sûr, je faisais de l’excès. Je crois que c’est aussi une conséquence de ma vie, de mes géniteurs …
- Et aujourd’hui ?
- Je suis épuisé. Et paradoxalement, j’ai de l’énergie à déployer. De ne pas le faire m’entame. Je crois que je suis épuisé dans ma tête. A force de voir à quel point l’homme est largué, l’adulte, pas le jeune. Grand vide, énergie étouffée dans l’œuf et une polis dans tous les sens qui fait remonter à la surface des égarements impossibles et beaucoup d’ignorance. L'ignorance ... C'est terrible.
- Retournez donner aux jeunes.
- Pas dans cet état de chiasme psychologique. Et puis, je l'ai fait pendant très longtemps ...
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