dimanche 25 septembre 2022

Êtres de peu de vérité

 



J’ai ouvert des portes de souffle dans des têtes obtuses. 


J’ai levé des chapes de plomb de sièges mentaux en berne, statiques, nécrosés et inertes.


J’ai fait valoir des clairières de sérénité peu ardues à condition de se les offrir. 


J’ai inculqué l’amour de soi et du miroir apaisant. 


J’ai appris à des êtres oublieux ou ne sachant pas l’art de s’aimer. Parce que s’aimer est paix et que paix est énergie de vie. 


Par besoin de tissage nouveau, j’ai ouvert mon antre d’art bâti, de lumière et de don de soi. Mon antre si jaloux de son intimité. Ma forge de mots et de mains créatives, créatrices de perspectives heureuses et de traces futures. 


J’ai aimé en silence des êtres absents, des êtres confus, des êtres en perdition programmé. Je vous ai regardé, j’ai déterré des pépites éparses, je les ai assemblées. Une valeur ajoutée, brandie, imposée aux autres railleurs, aux autres campés sur eux-mêmes, aux autres pauvres en humanité.

 

 

Qu’avez-vous fait de tout ce temps offert ?


Qu’avez-vous fait de ces yeux réparateurs ?


Qu’avez-vous fait de cette main aimante ?


Qu’avez-vous fait de tout ce temps de vie ?


Qu’avez-vous fait de cet humanisme donateur ?


 

La laideur tout autour fait peine à voir.

Et l’homme si petit dans le vol de la force.

Sans sourires de partage. 


 

Moi si jalouse de ma forge des mots,

De mon antre créateur,

Dispendieuse, pourtant, de forces intimes.


 

Êtres de peu de vérité.








lundi 12 septembre 2022

Parce que rêver a ses exigences, IV

 






 

Pour les personnes en butte au souci herméneutique, le silence est capital. Parce qu’il est tout en symboles et en symboles à décrypter. 


D’où me vient cette impérieuse nécessité de décoder ? Quelle effective utilité en tiré-je ? Pourquoi toute cette énergie, tout ce temps dilapidés à saisir les choses ? Le mot entendement a toujours été mien depuis très jeune. Pourquoi ? Saisir le silence, capter les micros-expressions, lire sur le visage l’être profond …


Tout devient-il livre à entendre ?

 

Il y a dans la démarche de lire quelque chose d’étonnant et d’emporteur.

 

Un parcours aux multiples ramifications, aux intéressantes aspérités. Il y a des clairières et des grottes, des monts et des montagnes, des fleuves paisibles et d’autres forts tourmentés … 


L’arrivée à la signifiance est un moment intense, jubilatoire et heureux. 


Et même quand on pose l’œuvre, des questionnements se poursuivent d’eux-mêmes, des recoupements se font et la vérité éclate toujours un peu plus. 

 

C’est ainsi qu’après une période d’étude, j’ai abordé l’homme de ma vie comme un livre à lire et à analyser. Je n’avais pas calculé les interactions et encore moins les effractions et les infractions. 

 

Un monde de livres et une énergie toujours renouvelée d’itinéraire livresque et philologique.

 

Aimer autorise-t-il l’étude de l’autre comme un spécimen de laboratoire ?








 



















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dimanche 11 septembre 2022

Tout un branle-bas ...

 




-       Pourquoi êtes-vous si ému ?

 

-       Cela m’arrive de plus en plus. Mon capital émotionnel s’érode. Tout un branle-bas …

 

-       Vous en connaissez les raisons ?

 

-       Oui … le changement de saison, la lourdeur de septembre, la fin d’un périple estival mouvementé …

 

-       Ce n’est pas exceptionnel.

 

-       Ce n’est pas l’essentiel non plus.

 

-       Dites toujours. N’est-ce pas pour cela que vous me payez ?

 

( Sourires )

 

-       Il y a des choses difficiles à déterrer. Le compromis entre soi et soi ne répond pas toujours. Pudeur, peur peut-être, résolutions ébranlées d’un coup …

 

-       Mettez des mots ordinaires sur vos profondeurs lancinantes.

 

-       Tenez ( rire ), vous parlez imagé à votre tour !

 

-       J’adapte.

 

-       Oui, des relents. Tout est manque amniotique ou ses ersatz non moins essentiels. Et puis la grande question de l’authenticité et de la confiance. Cette dernière exige une rigueur psychologique. Imaginons que ma meilleure amie soit chaotique sur le plan relationnel privilégié et que subitement, elle se rappelle de moi et de mes exigences ? Je ne peux lui accorder du crédit, mais sa survenue me vide émotionnellement.

 

-       Imagination ou réalité ?

 

-       Je vous ai dit « supposons » !

 

-     Pourquoi suppose-t-on de l’inexistant ? Pourquoi vos exigences sont-elles fort ressemblantes à celles des personnages mythologiques ? Si vous quittiez un peu votre tête ? Regardez le réel. Acceptez les déceptions, les traîtrises, la normalité … L’humain n’est pas Hercule ou Héraclès ou Œdipe. Il n’est pas non plus Nietzsche, Joyce ou Dali !

 

-       Vous oubliez Marie Curie, Beauvoir, Duras, Nawel El Saadaoui …

 

-       Je voulais vous signifier que votre monde intérieur est exceptionnel et de le plaquer sur le commun des mortels est peine perdue.

 

-       Je vous parle de ma meilleure amie, ce n’est pas l’épicier du coin !

 

-       Et bien, fréquentez-le, un peu, justement.

 

-    Ce ne sera pas moi. Ceci dit, je le salue toutes les fois que je passe devant son commerce. Il y a un monde entre la courtoisie de base et l’amitié.

 

-     L’épicier du coin vous sortira un peu du ghetto de la pensée spinoziste, de l’esthétique daliesque folle …

 

-     Je suis aussi un lecteur de Zola et, dans une autre mesure, de Romain Gary vous savez. Mon monde est définitivement en moi. Et quand je suis au dehors, il est en moi et je me tais. Au revoir.



                                             Méli-mélo de S.S-B.Z

 

 




















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samedi 10 septembre 2022

Le navire prend l'eau de partout ...

Carthage, septembre 22 



 

 

-       Je me jure tous les jours de faire taire en moi cœur et empathie, définitivement. 


-       Et ?


-       Juré.


-       D’accord, je vois. Vos mobiles ?


-       Le mensonge, l’égotisme, le manque de discernement.


-       Vous êtes excessif.


-       Je parle de ceux qui m’importent.


-        Peut-être êtes-vous trop exigeant ?


-        Oui, peut-être. Mais je ne calcule pas mes élans, je donne, je répare, j’insuffle de la force jusqu’à m’en vider.


-       Vous voyez : vous êtes excessif.


-       Je vis mal ici, c’est mon souci fondamental.


-       Parlez-en, je vous écoute !


-     L’ignorance fait rage. Comme à la fin du XIXème siècle. L’école éjecte tous les jours des milliers d’analphabètes. Ceux qui y restent, en sortent avec le même taux d’ignorance ou presque. Les plus éclairés quittent un navire qui prend l’eau de partout … Les mécanismes de réparation n’existent pas, c’est clair. Il n’y a à l’horizon aucun esprit décisionnaire puissant. Or, dans ce genre de contexte, c’est exactement ce qu’il faut, plus des agents exécutifs loyaux, consciencieux et qui ne rechignent point à l’œuvre. Un désert. Ce qui en sort : des formules empreintes de religiosité primaire, de superstitions diverses, dites à tout bout de champ comme pour se donner bonne conscience. Des formules insupportables de vacuité, de bêtise … d’autant qu’ils sont satisfaits de les claironner. Cela fait mal.


-       Déconnectez-vous un peu.


-       Vous savez pertinemment que je suis totalement en dehors du monde. 


-       Vous êtes hyper-interprétatif.


-       Je capte, oui, en effet.


-    Vous partez de chez vous avec des sentiments négatifs et un regard acéré et voilà le résultat.


-  J’ai revu une amie, il y a peu. La seule qui parle de Joyce et de Faulkner. Si je la perds, il faudra peut-être que nous y laissions notre liberté encore une fois.


-        Que voulez-vous dire ?


-    Rien. Je la vois très peu. Je n’ai plus confiance. Mais cela m’a assez vidé émotionnellement. 


-        Pourquoi ?


-       Je ne sais pas. Je suis fatigué. A mercredi prochain.


-       Levez un peu le pied et faites confiance.


        ( Regard appuyé. Fatigue et tristesse dans les yeux )


                                              Photo Sophie Granier


                                                      











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lundi 5 septembre 2022

Chiasme psychologique

 Carthage, le 5 septembre 22






-      Je me suis épuisé, lui dit-il. Je voulais aider, structurer, corriger, réparer les fêlures bêtes et gratuites. Je tendais la main pour aider à se relever, je donnais, j’orientais le regard vers ce qui avait de l’intérêt, vers le potentiellement beau.

 

-       Pourquoi faisiez-vous cela ? Pourquoi ce don de soi ?

 

-    Je ne sais pas. Ou plutôt, je sais. Pour le partage, oui, je le crois. Parce que j’ai eu beaucoup de chance de mon côté.

 

-       Oui, mais vous étiez dans l’excès.

 

-  Je n’en avais pas conscience plus jeune. J’étais très fort, j’avais beaucoup d’énergie. Plus je tirais, plus je trouvais. J’avais une source d’enfer, quasi intarissable. Au summum de la vigueur physique, on ignore la carence et je n’en avais jamais eue, d’aucune manière.

 

-       Vous regrettez ?

 

-    Non, parce que vivre n’a d’intérêt que dans le partage, l’aide aux autres. C’était aussi partie intégrante de mon travail. Bien sûr, je faisais de l’excès. Je crois que c’est aussi une conséquence de ma vie, de mes géniteurs …

 

-       Et aujourd’hui ?

 

-    Je suis épuisé. Et paradoxalement, j’ai de l’énergie à déployer. De ne pas le faire m’entame. Je crois que je suis épuisé dans ma tête. A force de voir à quel point l’homme est largué, l’adulte, pas le jeune. Grand vide, énergie étouffée dans l’œuf et une polis dans tous les sens qui fait remonter à la surface des égarements impossibles et beaucoup d’ignorance. L'ignorance ... C'est terrible.

 

-       Retournez donner aux jeunes.

 

-    Pas dans cet état de chiasme psychologique. Et puis, je l'ai fait pendant très longtemps ...








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