Cher Compatriote, Cher Monsieur,
Cher probable Parent,
L’exil vous sied bien et vous
êtes un soignant de la vue et probablement des âmes : un médecin. Quelle
magnifique profession !
Deux cent cinquante ans ou plus
de Beylicat font partie de notre Histoire et nul ne peut occulter ce temps
historique ni le gommer. Avec ses hauts et ses bas.
Vous parlez de résilience et c’est
en effet décisif sur le plan personnel, même si j’ose penser, avec votre accord,
que de part votre profession, votre réussite je veux dire, vous vous en êtes
bien sorti.
Je crois aussi, avec votre
permission, que votre histoire personnelle vous a été narrée et que vous n’en
avez pas vécu directement le trauma. Du sang neuf et la détermination d’avancer :
votre réussite.
En Tunisie, les choses se
seraient-elles passées de la même façon ? Je ne prétendrais pas pouvoir y
répondre mais la question vaut la peine d’être posée.
Pourquoi pas d’excuses
officielles de la part de l’Etat comme vous semblez vivement le souhaiter ?
A l’instar de la reconnaissance de feu Tahar Ben Ammar et de son rôle dans le
mouvement national ? Ou encore la scène de réconciliation symbolique entre
Sophia Ben Youssef et les Bourguiba dans « l’épopée postrévolutionnaire ».
Il y eut aussi une invitation adressée à toute
la famille husseinite et une réception fut donnée en leur honneur. Des actes
symboliques sans réelle efficacité ni rigoureux suivi par ailleurs.
Je crois, à mon niveau, que
Beylicat et République ne peuvent s’entendre. Je pense aussi que l’épilogue de
la colonisation a brouillé les cartes. Et comme dans tout changement, il y a
les anciens et les jeunes et Bourguiba a percé. Personnage fort et virulent, l’étoffe
des politiciens et des rebelles à une époque où le beylicat se portait très
mal, où feu Lamine Bey était souffrant et où les courtisans de toutes sortes allaient et venaient.
Ben Salah aurait-il mieux fait ?
Il ne peut y avoir une réponse à cette question. Spéculer sur l’Histoire n’a
aucun intérêt scientifique, c’est juste de la parlote. Rappelons juste que les
deux personnages avaient bon nombre de points communs.
Je crois qu’en politique
rien ne se fait dans la douceur et on marche toujours sur le cadavre des
autres. Le bilan de Bourguiba a contenu des moments forts, les 20 Glorieuses 55-75,
et puis la honte de la fin du règne et la succession des courtisans … L’histoire
qui se refaisait …
Je vois mal la République faire
son mea culpa au Beylicat, cela reviendrait à se désavouer en quelque sorte.
Par contre, le travail de Vérité est l’affaire des historiens justes, honnêtes,
objectifs et preux.
Je proposerais à la place du
pardon un colloque annuel sur le beylicat, sur la figure mythique de feu Moncef
Bey, sur l’intégrité de feu Lamine Bey … Que des spécialistes lèvent le voile,
expliquent le passage de la Monarchie à la République, les conditions qui y ont
mené.
Il n’est pas agréable de lire les
propos élogieux hypertrophiés, ni les condamnations sauvages des uns et des
autres, les propos injurieux fréquents rabaissent le débat et l’Histoire n’appartient
à personne, uniquement à la Tunisie et aux experts qui ont la tâche de nous
éclairer tous.
En vous souhaitant le meilleur
Docteur, parce que ce titre est le vôtre, à la force du poing et à l’agilité
des neurones et paix à tous ceux qui ont donné de leur vie à ce petit pays où
il nous manque encore la nécessaire rigueur de l’avancée indispensable, du
patriotisme désintéressé et de la Vérité vraie.
Du moins aujourd’hui.
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