mercredi 30 janvier 2019

Lettre à Dr Chafik Chelly


Cher Compatriote, Cher Monsieur, Cher probable Parent,

L’exil vous sied bien et vous êtes un soignant de la vue et probablement des âmes : un médecin. Quelle magnifique profession !

Deux cent cinquante ans ou plus de Beylicat font partie de notre Histoire et nul ne peut occulter ce temps historique ni le gommer. Avec ses hauts et ses bas.

Vous parlez de résilience et c’est en effet décisif sur le plan personnel, même si j’ose penser, avec votre accord, que de part votre profession, votre réussite je veux dire, vous vous en êtes bien sorti.
Je crois aussi, avec votre permission, que votre histoire personnelle vous a été narrée et que vous n’en avez pas vécu directement le trauma. Du sang neuf et la détermination d’avancer : votre réussite.

En Tunisie, les choses se seraient-elles passées de la même façon ? Je ne prétendrais pas pouvoir y répondre mais la question vaut la peine d’être posée.


Pourquoi pas d’excuses officielles de la part de l’Etat comme vous semblez vivement le souhaiter ? A l’instar de la reconnaissance de feu Tahar Ben Ammar et de son rôle dans le mouvement national ? Ou encore la scène de réconciliation symbolique entre Sophia Ben Youssef et les Bourguiba dans « l’épopée postrévolutionnaire ».

Il y eut aussi une invitation adressée à toute la famille husseinite et une réception fut donnée en leur honneur. Des actes symboliques sans réelle efficacité ni rigoureux suivi par ailleurs.

Je crois, à mon niveau, que Beylicat et République ne peuvent s’entendre. Je pense aussi que l’épilogue de la colonisation a brouillé les cartes. Et comme dans tout changement, il y a les anciens et les jeunes et Bourguiba a percé. Personnage fort et virulent, l’étoffe des politiciens et des rebelles à une époque où le beylicat se portait très mal, où feu Lamine Bey était souffrant et où les courtisans de toutes sortes allaient et venaient.


Ben Salah aurait-il mieux fait ? Il ne peut y avoir une réponse à cette question. Spéculer sur l’Histoire n’a aucun intérêt scientifique, c’est juste de la parlote. Rappelons juste que les deux personnages avaient bon nombre de points communs. 

Je crois qu’en politique rien ne se fait dans la douceur et on marche toujours sur le cadavre des autres. Le bilan de Bourguiba a contenu des moments forts, les 20 Glorieuses 55-75, et puis la honte de la fin du règne et la succession des courtisans … L’histoire qui se refaisait …

Je vois mal la République faire son mea culpa au Beylicat, cela reviendrait à se désavouer en quelque sorte. Par contre, le travail de Vérité est l’affaire des historiens justes, honnêtes, objectifs et preux.

Je proposerais à la place du pardon un colloque annuel sur le beylicat, sur la figure mythique de feu Moncef Bey, sur l’intégrité de feu Lamine Bey … Que des spécialistes lèvent le voile, expliquent le passage de la Monarchie à la République, les conditions qui y ont mené.

Il n’est pas agréable de lire les propos élogieux hypertrophiés, ni les condamnations sauvages des uns et des autres, les propos injurieux fréquents rabaissent le débat et l’Histoire n’appartient à personne, uniquement à la Tunisie et aux experts qui ont la tâche de nous éclairer tous.


En vous souhaitant le meilleur Docteur, parce que ce titre est le vôtre, à la force du poing et à l’agilité des neurones et paix à tous ceux qui ont donné de leur vie à ce petit pays où il nous manque encore la nécessaire rigueur de l’avancée indispensable, du patriotisme désintéressé et de la Vérité vraie. 
Du moins aujourd’hui.


Bien à vous.


jeudi 24 janvier 2019

Carthage la Mère ...

















I.
Au pied d’un des plus beaux monuments de Carthage, une route sinueuse de plus en plus avalée par la ville. Je passe ma route et je croise un couple original. Lui vêtu d’une longue djellaba avec en-dessous un pantalon, un turban hindou sur la tête, une barbiche teinte en rouge henné.
Elle entièrement couverte de tissu avec une khama sur le visage, une sorte de niquab personnalisé avec un pan relevé sur l’arrière de la tête. Ils sautillaient tous les deux arborant un sourire d’enfants déguisés et heureux de leurs déguisements. La vingtaine entamée, tous les deux.
Rien de bien particulier si ce modèle de couple n’était pas aujourd’hui donné à voir par certains médias, comme une apparence bien de chez nous.  Par d’autres, tendancieux,  comme le modèle de la sainteté. Comme si la « sainteté » ou plus justement l’honnêteté qui n’est pas affaire de religion elle, était liée à l’apparence vestimentaire.
Ce très jeune couple avait l’air débonnaire, innocent et surtout simplet. Un préjugé, peut-être. L’observation, la démarche enfantine et chaloupée, le sourire à tout-va me font croire à la grande innocence voire à l’extrême naïveté.
Ce que je voudrais juste signifier, pour peu que j’ai raison, c’est que ces enfants ou presque ne pourront d’aucune façon devenir plus tard des parents constructeurs de personnalités, formateurs d’esprits libres et créateurs. Comment peut-on à ce point ne pas s’occuper des esprits jeunes qui sont potentiellement tellement riches sur le plan réflexion, imagination et réalisations, pour peu que l’encadrement soit rigoureux ?
L’école revue et corrigée, l’école dynamique et repensée en permanence est le chemin des grandes réalisations.


II.
Un ami peu habitué aux anciennement célèbres quartiers des mers du nord me dit être déçu de leur nouvelle configuration en comparaison de ce qu’il en savait : des villes avec tous les inconvénients, forte concentration, circulation, mouvement, habitants différents …
Les quartiers vieillissent avec leurs habitants. Quand ceux-ci partent, ils se vident un peu de ceux qui constituaient leur âme. Les nouvelles générations regardent souvent ailleurs ou n’innovent pas. Ils peuvent aussi vouloir vendre. Place donc aux nouveaux. Des amoureux ou des spéculateurs ? Là est toute la question.

Pour les propriétés qui croulent, la solution est souvent de louer et pour peu que ces demeures soient relativement grandes, la location se fait par studios aménagés à la hâte. Des étudiants s’y installent pour l’année universitaire, des couples très modestes à l’année … L’été, ces mêmes studios sont loués aux vacanciers qui profitent alors de la mer à très petits prix.

L’essentiel n’est pas là, à savoir : la préservation de ces quartiers qui vieillissent et qui furent beaux et quasi imprenables pour d’autres personnes que leurs habitants de toujours.

Il y a aussi tous ces propriétaires tunisiens d'antan qui sont partis en France ou ailleurs qui ont choisi de s’expatrier pour plusieurs raisons. Depuis leur départ les choses ont changé et on peut aisément constater qu’il n’y a plus de diversité du Vivre, du Manger, du Loisir, de la Liberté d’être et de paraître.

La dénaturation complète,  elle,  vient des spéculateurs. Des bâtiments en hauteur en front de mer à la place des petites villas d’été quelquefois à même la rue. Et puis du clinquant, de l’aluminium et du vert fumé. Autre chose, autre époque, autres gens, autre vie.

La Mer ne peut que souffrir de cette surpopulation, de ce bruit, de l’irrespect des côtes, de la surconsommation, du manque d’amour, de cette nouvelle façon d’être si pressée et si gloutonne.

Je ne sais si ce sont les années qui passent ou la sourde colère mais il ne fait bon sortir que très tôt le matin ou très tard le soir avec sa compagnie canine si compréhensive.


III.
La Jetée, je l’imagine, une mer rare alors et des bruits de grande musique au loin. Un restaurant dans l’eau. Des baraques en bois en face de l’océan, des chaises longues et des parasols pour le soleil brûlant du jour. Des couples qui se regardent dans les yeux et des mains qui se frôlent furtivement, des sourires de désir contenu chargés …

Elle en robe blanche à pois, col Claudine, une rangée de perles, une taille fine comme pas possible aujourd’hui  - avec les hamburgers, un mot presque vulgaire qui m’échappe – et des escarpins qui rehaussent la finesse de ses chevilles. Elle sourit, elle rit et le regarde. Elle l’aimait puissamment, elle, la petite sans mère, élevée par la première puis par la deuxième nourrice sous le contrôle sévère d’un père vigilant. Elle l’aimait de toutes ses forces et se préparait à cette vie à deux si attendue. Elle était jeune, avait une belle peau, un visage fin et ne croyait qu’à l’amour. Et les chansons si romantiques du crooner égyptien. Il en était épris fortement et n’attendait que la date de leur union. C’était l’époque des regards, des mots rares, des frôlements passionnés, de la musique des mots, de la force des notes, du rire en cascades.

Sa nuit de noces, un février 59, sa grand-mère l’accompagna jusqu’à chez elle, un geste de filiation pour remplacer une génitrice qu’elle n’eut pas l’opportunité de connaitre. J’aime aussi l’humanisme sans fioriture.


IV.
J’ai annoncé officiellement, il y a quelques années, l’ouverture de l’OVPL. C’est que je suis nourrie au Manifeste du Surréalisme et plus en avant à l’esprit de Dada. Que bien que le Romantisme me déplût foncièrement vers la fin, je fus une fervente liseuse d’Hugo et puis de Baudelaire et bien sûr de Rimbaud et d’autres. Par la suite, je regardai sous toutes les coutures les œuvres de Max Ernst et je tombai en amour de Dali le Génie. OVPL en 2016, je crois, sur un réseau social.

Ouvroir virtuel de philosophie légère. Sur le modèle de l’OULIPO, du moins dans l’appellation.

-          - Mom, personne ne te comprend, tonnait Divine.

Et ce fut, pourtant, des échanges percutants avec des amis riches, de cette richesse de la réflexion, de l’Histoire, de la recherche, de l’humour, du tac au tac littéraire, philosophique, humaniste.

Et moi je rêvais de romantisme – du moins de la première heure – de réalisme, de naturalisme sans excès et du dieu de l’Olympe, Symbolisme. Mes amis et moi prenions un vrai plaisir à faire du ping pong sur le Net. Sartre, Camus, Nietzsche, la volonté de puissance. Un de mes amis féru des Vies, des univers parallèles, proposait fréquemment de réfléchir sur ce que nous ne saisissions pas. Sacré Adel B.

Réinventer le monde, donner à voir une réflexion renouvelée. Que pouvions-nous inventer que l’Homme n’a pas déjà mis au monde ? La Sacrée Grèce déjà.

Peut-être un visage plus prompt, plus leste à ces nouveaux moyens de communication ?
Peut-être un rôle nouveau à la réflexion dans un espace ou Roco Sifredi côtoie l’esthéticienne la plus inconsciente qui fait sa promo micro-blading.

OVPL, un moment magique, il y avait comme un kairos consenti et nous nous devions de « faire fonctionner la Grise au max » comme aux temps des examens avec l’âge adulte en sus, les bonheurs, les douleurs, les deuils et l’angoisse de la mort.

Merci chers tous. Je reprends du service.










jeudi 17 janvier 2019

Le passé n'est jamais mieux porté que pour aller vers l'à-venir



L’Histoire ne s’écrit pas sur 50 ans ni sur 70 ans, il lui faut bien plus. Veillons aujourd’hui à ce que nos descendants puissent l’écrire parce qu’il y a péril en la demeure.

Aujourd’hui 17 janvier 2019, personne sur mon lieu de travail, hautement incompétent, mais où les choses roulent. C’est bien.

Beaucoup, des responsables administratifs de l’heure, tout particulièrement les trentenaires, « font tourner la baraque » avec zéro avancée réelle, zéro richesse de l’esprit et impact sur les jeunes. Un système sclérosé dans bon nombre de domaines. Et ils sont satisfaits. C’est qu’ils ne peuvent aller au-delà de leurs limites : ils ne les voient pas. Et il fait bon, aujourd’hui, dans notre pays, être épais.

Je pense aux jeunes notamment, je pense à l’école tunisienne, je pense aux programmes, un pays où on pratique encore le parcoeurisme … C’est tout vous dire.

Je vais sur un groupe que je trouve peu net. C’est la deuxième fois je crois. Peut-être la troisième. Je fais part de mon incompréhension, je pose quelques questions. Sur la pointe des pieds et dans le respect de rigueur. Dans ce groupe, bizarre à mes yeux, on parle beaucoup de mes origines paternelles et même maternelles, un mélange d’empire ottoman et de guides spirituels.

Bon nombre de mes proches en ont fait leur motif d’existence, surtout les hommes. Et c’est le fameux : « Nous. » Mais encore, « Nous les Beldis. » Et une infinité de propos que j’entends à l’identique depuis près de cinquante ans.

Je déteste l’uniformité et très tôt j’ai développé un goût pour la différence, le ton libre, la curiosité de la chose intellectuelle, l’amour exclusif du livre … Mon grand-père maternel, un dignitaire religieux, fils et petit-fils de religieux, fut, relativement jeune, un spécialiste de la soie et entre Ezzitouna et les souks, il se construisit. Son histoire personnelle d’enfant de parents divorcés, à une époque où le divorce ou la répudiation, plus justement, étaient tabous, le hanta toute sa vie.

Sa mère de 15 ans qu’il appelait Lé Halouma fut remariée à un Turc d’un mètre 90 qui fut très paternel avec lui mais qu’il refusa d’hériter. Il fut élevé par deux tantes austères et fut pratiquant toute sa vie doublement parce qu’il commença la prière à 17 ans. Je crois que je pris mon modernisme chez lui mais aussi chez mon père. Sidi AB envoya sa fille à l’école et intercéda en ma faveur quand je décidai de me marier à un « roturier » contre tous, parce qu’il était libre et tellement avant-gardiste intellectuellement. La liberté vraie est affaire de survie et non de gavage affectif.

Sidi AB avait deux sujets de conversation : le Prophète et Bourguiba et, énormément de lectures . Il le suivit toute sa vie, médiatiquement. Il le trouva à point pour l’époque et lui si « Beldi », si vieux Tunis, si indépendantiste, si religieux, si solitaire, presque ermite, tomba amoureux de la rigueur administrative du colon. Et fit après le commerce, de l’administration française pour être gratifié en fin de carrière d’un long périple français et européen qu’il fit avec son fils unique qu’il éleva « en homme, aux valeurs d’homme et à la valeur Travail qu’il plaçait au-dessus de tout. »

Pourquoi j’évoque Sidi AB ? Pour sa liberté, pour sa capacité à faire la part des choses, pour sa foi en la liberté nécessaire de la femme, pour son regard juste sur les choses, pour sa lecture incroyablement épurée de l’Histoire. Et jusqu’au bout, il dit aux colons, la valeur intrinsèque du Tunisien.

Une anecdote, puisque je me raconte, bien que ce ne soit pas trop dans les habitudes de la maison : très jeune, ma génitrice me proposait à chaque obtention de diplôme, de passer d’abord chez Sidi AB afin qu’il soit le premier à en être satisfait. Il chaussait ses lunettes et poussait deux ou trois hum-hum,  me félicitait et me demandait de départager ma chevelure - d’un mètre, à l’époque -  pour ensuite me passer la main sur la tête affectueusement et me proposer deux tresses « en raison de la pollution ». Je le bousculais, l’étreignais, l’embrassais en riant aux éclats : « Je suis moderne et fille de moderne moi, comme toi ! »

Toute mon obsession du futur vient de là, de la relation avec mon père aussi qui était un croyant mais un croyant agissant et agité, très peu convaincu des concepts de Destin et de Prédestination en islam. Il avançait toujours le rôle de l’Homme, de la raison dans la perception du monde, la Raison comme instrument de connaissance certaine. Non, l’Homme n’est pas que « dirigé », il est aussi  « choisissant » ; trop facile de faire croire au grand Livre de ce QUI DOIT ARRIVER.

Quand les choses se compliquaient, il mettait fin à la polémique et il n’eut même pas le temps de vieillir pour angoisser de ses hardiesses intellectuelles, il partit à 62 ans, en près de dix minutes.

Je ne suis pas trop du genre à m’exposer et à exposer les miens que je porte en moi comme un étendard et dont la combinaison, et peut-être un peu, un moi profond, m’a très tôt poussée à réfléchir par moi-même. Voilà pourquoi l’image de mon géniteur, enfant chéri et bienheureux, de descendance noble, baisant la main - impensable ! -  de mon grand-père maternel me parait d’une beauté rare, bien que ni moi, ni mes enfants et encore moins mon feu partenaire « roturier » et fier, n’aurions fait cela. Et à personne. Sauf par amour.

Le passé n’est jamais mieux porté que pour aller vers l’avenir et l’imaginer. C’est fait pour ma part, pour mes descendants. Nous sommes libres, notre valeur est dans notre implication, l’identité ne veut rien dire, ce qui fait de nous des êtres de valeur est notre propre Praxis. On peut être fiers de ce qui est derrière mais gare à en faire notre seul atour.

Cela me rappelle un ami qui perdit son frère rapidement et douloureusement. Excellence, lui dit-il, adieu. Je respecte la douleur, j’ai perdu tous les miens très tôt et au détour des chemins de beauté naturelle. Mais Excellence ne veut rien dire pour un mort. Absolument rien. Et c’est même obscène. Désolée.


Dans les règles de l’échange, j’ai appris à privilégier d’abord le respect de l’autre. Et d’ordinaire, de lui-même, il y consent tacitement. Sur le Net et dans les groupes, c’est différent et mon amie la militante Amina Arfaoui, grande universitaire nourrie à la culture germanique, l’a bien signifié : certains refusent les voix libres et s’en offusquent.

D'autres veulent s’imposer via l’âge, via une généalogie d’érudits religieux, via un silence de l’interlocuteur auquel ils sont habitués. Ne comptez pas sur moi. Je respecte les respectueux, je tourne les talons dans le cas inverse.


Mémoire d’une Chéchia. A peine mon incompréhension exprimée que je vis, après coup, une série d’anathèmes totalement en inadéquation avec ce qu’ils nomment l’éthique du groupe.
Pourquoi ? Pourquoi appeler à intervenir alors ? Faut-il uniquement encenser le passé ? La parole libre est-elle prohibée ?

L’administrateur convint que l’intervenant est « un Troll, qui fit venir sa troupe, qui fit son petit marché, qui occulte son nom – les pseudos sont monnaie courante chez eux et sur le Net d’une façon générale. Moi j’utilise mon nom de scribe et celui de mon père.

Il continue : «  qui tient des propos bêtes et méchants, qui vient du Sahel »  : région côtière qui donna à la Tunisie de grandes références administratives, diplomatiques, universitaires …

- Déclinez le nom de votre région, tonna-t-il !
- Tunis OJ, de toutes parts depuis quelques siècles. Ai-je des chances d’être à votre droite telle une bienheureuse ? C’est indépassable, vraiment …


Elle est où l’éthique svp ? Le respect d’autrui ? La tolérance de l’avis adverse ? L’acceptation de la parole libre ?

Près d’un demi siècle à penser, à penser presque au quotidien, sauf les périodes de fatigue de l’esprit, à vivre en conformité avec ses principes de vie, à donner, à verser de l’intelligence au premier sens du mot, aux siens proches, aux autres nombreux, à structurer les confus et à lire, à boire goulûment des livres et des livres … «  Critiques bêtes et méchantes » … 
Je reste correcte sinon je vous mets aux défis des joutes spirituelles, de l’esprit, au premier sens.


Je ne suis point bourguibiste, sujet de Grande Discorde chez vous. J’admire le Bâtisseur. Je suis admirative de Moncef Bey alors que c’est plutôt Lamine Bey qui m’est plus proche. Mais l’Histoire est L’Histoire et non la petite histoire. Que je respecte par ailleurs tant qu’elle ne tombe pas dans des considérations de bijouterie. J’en avais les oreilles rabattues.

Ben Ali a été un accident de l’Histoire et une honte sur le plan de la formation du Tunisien. Lui qui pensait bien faire avec son dada du Tunisien moyen et du « Vivre correct ». Ce que nous vivons aujourd’hui est d’une gravité sans pareil : de l’inculture totale et une hyper incompétence dans la gestion des affaires politiques. Le Tunisien est loin de tous les paramètres de la correction, de la politesse, de la culture, du savoir, du respect et cela assez majoritairement. 23 ans de benalisme et de petitesse sont passés par là et de la répression en-voici en-voilà.

Aujourd’hui l’urgence est de se rassembler avec un seul objectif, avancer, bâtir des routes pour parvenir au plus jeune d’entre nous à Gafsa ou à Tataouine et lui signifier que nous voulons l’aider à relever la tête, à apprendre, à ne pas se laisser entraîner dans la drogue ou le terrorisme, à croire de nouveau en la Valeur école, la seule et l’unique, à y apprendre les langues de la même façon, pour pouvoir trouver le savoir là où il est ( la langue arabe qui refuse les emprunts linguistiques souffre d’un déficit de termes spécialisés dans de nombreux domaines, dès qu’il s’agit de traduire. )


Le monde moderne a une telle avancée. Avançons avec nos moyens, diversifions, apprenons, essayons, cassons-nous la figure, relevons-nous mais AGISSONS.

J’agirai sur mon pays jusqu’au dernier souffle, avec ce que je possède de mieux opérationnel en moi. Et quand ce ne sera plus moi, ce sera les miens et tous les autres.

L’inertie est mort et je ne mourrai pas de mon vivant. Merci à mon grand-père, les nattes, c’était juste pour vous, par amour. Sinon nous sommes les Libres du pays.

Sam Sehili B. Z.










samedi 5 janvier 2019

La traductrice irritée

                                                       








Elle fut une jeune fille rêveuse. Belle, de peau laiteuse, souriante. Nourrie aux romances égyptiennes,  à la voix du crooner égyptien de l’époque, de la sensibilité exacerbée, de l’amour.

Puis, fiancée à ce beau jeune homme, ils allaient en bord de mer, au volant d’une Simca aronde bleu ciel. Son chaperon avec elle. C’était l’époque. Le transistor faisait entendre les complaintes de A. El Halim.

Le monde arabe des années 50. Elle s’était mariée en 59.

Aujourd’hui ma Divine porte son alliance au doigt. J’aime. 
A l’intérieur de petites inscriptions : leurs prénoms, la date de leur mariage. Février 59. Merci ma Divine, un geste de sensibilité, de filiation, de reconnaissance. La Mère est un Océan. Pardon à mon géniteur. Le col Claudine et la robe à pois …

Le monde arabe des années 50, un monde d’art, de grand Art, de romantisme, de beauté, d’amour. Sûrement pour une catégorie, oui sûrement, comme ailleurs à ces époques révolues.

Et puis la vie conjugale, l’amour bien sûr, les enfants, un enfant mort à deux ans, un enfant à la beauté lumineuse « destiné à mourir pour tant de beauté insensée », le diabète pour lui et puis la douleur pour elle. 

Venue au monde de la Scribe et de nouveau l’espoir, la vie reprend de plus belle.
Sa fille à lui. Très tôt, il lui attribua une chanson : j’ai croisé deux jeunes filles, l’une est un faisceau, l’autre une bougie éclairante … Il en fut fou.

Et puis les sens dessus-dessous de la vie, le fils sacrifié …

En mémoire, ces soirées hilarantes pour la Scribe où elle, plongée dans un film d’amour et de mélodies, de jeune premier renversant, refusait de lui traduire l’égyptien qu’elle comprenait et qu’il ne pigeait pas d’un iota.

-         - Attends ! Pas maintenant !
-         -  Que lui dit-il, dis-moi ?

Un regard d’acier. Il lui cassait ses rêves à elle et lui se voyait susurrant de l’amour à l’oreille de Leila Mourad, la sublime cantatrice égyptienne.   Je les aimais tant … 

Tout ce besoin que nous avons tous d’aimer, de croire en l’autre, de l'étreindre, de l’avoir dans la peau …
Ils avaient de 50 à 60, je les croyais vieux, radoteurs. Pardon, 20 ans c’est bête quelquefois, ce n’est pas faux.

Au soir de son Existence, on aime. On aime l’autre, on aime l’Amour. On aime la plénitude des sens. C’est la réplique cinglante à la mort. Oui peut-être la Crapule, mais au final l’extinction d’un organisme qui n’a de vrai que ses multiples palpitations.













vendredi 4 janvier 2019

Partir de musique ...


Elle, c'est moi.

Enfoncée dans son lit, elle s’excusait de ne pas pouvoir nous recevoir, rester avec nous. La même voix séduisante. Mon cœur frétille pour elle. Elle aime tant la musique. L’art, l’amour et la Beauté.  Elle a passé toute sa vie à rêver la Mer. 

J’ai une telle sensibilité pour ces êtres d’Art exclusif, de Rêves et de Passion. Elle fut aimée mais peu. Elle fut dorlotée mais peu. Et aima ce peu. Une femme nourrie de contentement.

Et puis toutes ces choses que je tais par pudeur et par respect. Parce qu’il arrive souvent que les êtres nés dans l’opulence se trouvent au bout du chemin dans l’humilité des lieux. Qu’importe ! Sauf aux yeux de ceux qui ont fait le chemin inverse. Et puis quelle laideur, cette satisfaction mauvaise !

Nous mourrons tous un jour et je le disais à Randou à l’instant, l’avantage de la mort c’est que nous ne la sentons pas au moment où elle est là. Elle s’installe, nous sommes partis. Alors opulence, humilité, méchanceté, nous y serons tous aujourd’hui ou demain, à son gong.


... Une fontaine, des poissons rouges, l’homme de ses jours et de ses nuits à ses côtés, des mélodies, une table basse, un napperon d'antan brodé de mains italiennes du siècle dernier, du thé fumant … 

Vivre des instants de quiétude pareils et devancer de loin les agrippeuses de sous.


Que tu puisses t’envoler comme un cœur aimant, un cœur battant sur un air de musique divine.
<3