Nous vivons, en ce moment, en Tunisie, dans la conscience
forte du processus historique de notre pays. C’est assez rare et les enjeux
sont fortement importants. Il tarde de bâtir une république nouvelle.
La révolution ou, ce qu’on appelle ainsi, nous a exaltés, nous laisse pantois, trop pantois.
Si l’expression est libre, s’il n’y eut jamais autant de débats politiques, de
partis politiques, la visibilité, elle, est inexistante et l’inquiétude grande.
Nous avons commencé par assister, indignés, à l’arrivée d’ici
de là de prédicateurs avec tout l’attirail saintement marketing : robe
blanche immaculée, montre or-diamants, grosse cylindrée, souci du timing avant
le prêche…en réalité, un vrai phénomène de société orientale et un « concept »
plutôt nouveau pour la Tunisie. Un regard incisif voit tout de suite l’aspect
purement commercial et bien entendu l’utilisation politicienne. La monnaie
trébuchante s’entend et les oreilles averties saisissent l’entourloupe. La Tunisie a vite fait de s’ouvrir
aux commerçants de Dieu.
Après cela, il y eut la naissance grâce, entre autres, au
chômage florissant, des ligues de
protection de la révolution. Il s’agira en fait de protéger la révolution d’elle-même
et de ses objectifs. De la détourner.
Les appels au travail, à la liberté, à la
dignité devinrent main forte prêtée aux agents de sécurité du MI. Protéger la
révolution devint donc promouvoir l’action gouvernementale et s’attaquer aux
manifestants. Pour le moins paradoxal.
Naissance également à tour de bras de partis politiques, d’ambitions carriéristes, d’égo surdimensionné…
La Tunisie est bien trop petite pour pouvoir tout digérer d’autant
que le temps d’assimilation ne lui fut pas donné.
Un trouble réel existe aujourd’hui et une vraie anxiété :
les lendemains seront-ils meilleurs ?
Car pour l’heure tout va à vau l’eau.
Le chômage s’amplifie à vue d’œil, le tourisme est au point mort, la violence
augmente, les régions de l’intérieur et les campagnes sont dans un état d’abandon accentué.
On est même arrivés à l’assassinat politique sans parler de
ce que l’on tait parce que plutôt particulier, l’impact grandement nocif du
stress lié aux événements politiques sur la psychologie et l’équilibre du
Tunisien.
Où va-t-on ?
Que sera l’avenir de nos enfants ?
Les objectifs de la révolution seront-ils atteints ?
Travail, liberté, dignité seront-ils le lot des Tunisiens ?
L’alternance dans l’exercice du pouvoir prendra-t-elle racine
et deviendra-t-elle effective ?
Parviendra-t-on à étouffer dans l’œuf ce que nous connaissons
depuis 50 ans : le Parti-Etat aux mœurs louches, aux méthodes pour le moins
déloyales et peu orthodoxes ?
El Bedira ou l’initiative nationale pour un front uni des
forces démocratiques paraît être aujourd’hui l’alternative louable pour contrecarrer
un projet potentiellement dictatorial et théocratique.
Qu’est-ce que El Bedira ?
Une initiative citoyenne qui a pour objectif de rassembler
toutes les forces démocratiques du pays, tous ceux qui partagent le même projet
politique : démocratie, état républicain, respect des libertés, état de droit,
parité, citoyenneté…
Il s’agit donc d’asseoir les bases réelles et incontournables
de l’Etat civil.
Les participants viennent de plusieurs régions : Bizerte,
Sousse, Sfax, Nabeul…
Rassembler ne signifie en aucun cas perdre sa couleur, le
timbre de sa mouvance, il ne s’agit pas de se fondre ni de perdre son identité
partisane, politique. Il s’agit tout d’abord d’être lié par le même objectif :
l’Etat civil républicain et démocratique.
Ce rassemblement doit pouvoir prendre de l'ampleur, il doit être la preuve concrète que la leçon a été retenue. La Tunisie de l'heure n'autorise pas l'égotisme ni l'ambition personnelle. La Tunisie du moment a vitalement besoin d'inscrire définitivement dans ses pratiques politiques l'alternance dans l'exercice du pouvoir, de garantir le respect des libertés. La 1ère pierre est à poser et à poser durablement.
L'initiative nationale pour un front uni, El Bedira donc, regroupe et regroupera un composé cosmopolite de partisans, de syndicalistes, d'indépendants, de militants associatifs...car la différence ne pose pas problème quand la ligne directrice première est commune.
La famille démocratique est grande, très grande et c'est tant mieux mais l'heure historique tunisienne n'admettra pas l'ambition personnelle.
Il s'agit de mettre sur pied une Tunisie nouvelle, réellement démocratique qui barrera la route aux débordements passionnés, aux délires paranoïaques et aux ambitions hégémoniques nourries de programmes extérieurs gravement nuisibles à la souveraineté nationale.
Aujourd'hui, le recul dans tous les secteurs, la violence, l'anxiété sociale, l'incompétences de certains politiques aux commandes, la pieuvre partisane qui déploie ses tentacules et tente d'assiéger le mental des gens simples, tout ceci devra nous pousser à regarder du côté d'El Bedira, à prêter l'oreille à une idée au final très simple : s'unir pour garantir démocratie et libertés.
Nabil Ben Azouz, coordonnateur de l'INFU, militant, agitateur d'idées, historien ne cesse de marteler une attitude politique moderne qui lui tient à coeur et qui consiste à agir par le bas sur les dirigeants de partis.
Une idée phare : nous devons, toutes particularités confondues, et en tant que force vive agir sur les décideurs de notre famille politique. Tant la verticalité est désuète, abrutissante et dangereuse.
Un dirigeant est exposé à la mégalomanie, voilà pourquoi il faut se faire entendre quand on est adhérent à un parti. Les lignes déterminantes exigent la participation de tous, elles doivent émaner des bases, des partisans qui constituent une force de par leur nombre, l'essence même d'un parti et son bon sens.
Démocrates de tous bords, votre salut est dans l'union, dans la participation à la prise de décisions qu'il faut savoir insuffler, dans votre détermination à être des adhérents agissants afin de doter la Tunisie de traditions démocratiques qui, elles, seules, sauveront nos enfants de la laideur et du danger de l'embrigadement et de la perte de leur tunisianité.
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