Il y a mentir et puis il y a mentir et les politiques sont de ceux-là.
La Tunisie va mal, les jeunes s'abrutissent de jour en jour, la religion est devenue un fond de commerce qui permet de racoler large : les démunis, les chômeurs, les écorchés-vifs, les aigris, les frustrés, les en-souffrance de tous types...
L'argent est le maître des hommes politiques actuels, des hommes politiques de toujours, le refrain religieux, les hauts-parleurs mis au max, les défenseurs d'une révolution usurpée, l'infiltration de l'appareil de l'Etat par des exécutants partisans...tout cela est une stratégie de longévité, tenir la barre, s'accrocher à tous prix...
Le Qatar un carré schizophrène ressemble à un court en souffrance qui ne peut se rallonger bien que brassant des billions. Que faire? Acheter le monde, ici, ailleurs, ce ne sont pas les hétaïres qui manquent. Crise oblige et argent mordant.
La Tunisie est belle, trop moderne. La posséder d'abord, l'aplanir ensuite. Tel est le caprice de Cheïkha Mozza. Ce sera le cadeau de madame par monsieur tiroir-caisse, rien que pour faire se retourner Bourguiba dans sa tombe. Incompréhensible celui-là pour les chameliers déambulant aujourd'hui en kamiss et savates dans leurs palaces marbrés. Donc mécréant.
La Tunisie gronde tandis qu'elle se fait dessiner les toilettes qu'elle portera pour faire taire Carthage.
J-PGaultier ? J-C Jitrois ? Jaune poussin ? Vert gazon ? Jaune poussin, vert gazon, mauve aubergine, bleu violacé...et toutes les déclinaisons qui vont avec. Et madame Silicone Bistouri donne des leçons à un peuple trimillénaire, à des hommes vaillants et des femmes libres - parmi lesquels il y a certes des égarés - du haut de ses billions.
Les braves 217 en stressent plus d'un, j'en connais qui s'est éteint de stress politique, de dégoût de la scène tunisienne. La realpolitik est laide à voir, la dictature de la majorité - somme toute bien relative - est insupportable d'autant qu'il s'agit d'une majorité inconsciente des enjeux, manipulée, crédule, opportuniste, partisane quel que soit le parti pourvu qu'il soit le plus fort en tactiques de racolage.
Sous Bourguiba, l'école fut obligatoire pour tous. Le loup politique en comprit l'urgence et l'impérieuse nécessité. Les sortir de l'ignorance, les mettre sur la route des nations éclairées, les impliquer par la suite dans l'Administration. Plus de cinquante ans d'école, une percée des femmes, une avancée certaine. L'épanouissement n'eut pas lieu car Ben Ali misa sur l'abêtissement, l'école fastfood, rapide, creuse, insipide, indigeste. Un prestigieux établissement - de par son histoire du moins - vue imprenable sur mer, beau quartier, héritage colonial, possédant un immense espace autrefois réservé à l'étude, porte d'antan en bois noble, 25 cm d'épaisseur, une bibliothèque comme il n'y en a plus. Pas un seul livre, aucun entretien, un établissement sans bibliothèque, un bien consenti par les colons pour eux-mêmes certes, récupéré par les autochtones libres et comme tant d'autres inexploité, désaffecté par manque d'initiative.
La période Ben Ali brilla par la superficialité, bannir toute réflexion approfondie, tout esprit critique. Apprendre à se taire ou continuer à se taire - c'était le cas sous Bourguiba - mieux : exceller dans l'art du lèche-bottisme.
Un enseignement sans envolée, sans conclusion, inachevé d'une certaine façon, ce qui explique l'édifiante vacuité de l'heure et l'antagonisme total entre ceux qui ont cultivé une curiosité personnelle parallèlement aux connaissances reçues sur les pupitres et ceux qui ont été sacrifiés sur l'autel de la politique politicienne et qui, bien que souvent diplômés, souffrent d'insuffisances réflexives et de recul.
Elle est passée où ma Tunisie ?
Son ciel bleu et sa luminosité, ce je-ne-sais-quoi d'ici et de nulle part ailleurs qui fait que ta poitrine gonfle à l'approche de l'été. Rien qu'aux senteurs. Le muguet s'infiltre dans les narines, l'odeur de la méditerranée à même le flanc de la terre, aspergeant sa tête, son cou, son ventre, ses jambes. Pays unique que je n'échangerai pour rien au monde.
Elle est où ma Tunisie quand madame la députée entre rires étouffés et arabe littéraire du XIIème siècle lit son texte vide de toute suggestion intelligente, qu'elle ponctue de phrases assassines, circonvolutions comprises d'elle-seule et de sa bande ?
Quand madame la présidente tance l'opposition, la rabroue, la coupe, la foudroie du regard comme un enfant maladroit, qui se trompe, qui parle et qui doit se taire, bienséance oblige ?
Elle est où ma Tunisie quand dans l'arène de la "légitimité", on traite de chien un homme de bien, un technocrate qui s'insurge contre des primes en temps de misère ?
Elle est où ma Tunisie que je ne lâcherai jamais aux mains des sangsues ?
Elle est où ma Tunisie que je ne lâcherai jamais aux mains des sangsues ?